La théâtralité propre au langage cinématographique de Bergman émerge cette fois-ci d’un huis clos à ciel ouvert sur une île de la mer Baltique. Une partition pour quatuor d’acteurs qui met au cœur de l’action une jeune femme chancelant entre la folie et la réalité, entre des moments d’espoir et la fatalité. L’appel de Dieu se présente à elle comme la seule avenue salvatrice. Autour d’elle, un mari déchiré entre l’amour et la résignation, un père écrivain absent, troublé, axé sur lui-même et rêvant de célébrité et puis son frère cadet dont la virginité et le désintérêt pour les filles l’intrigue au point d’avoir envie de le dépuceler. Les trois personnages masculins font face à l’incurabilité de la maladie de Karin avec chacun leur émoi et celle-ci choisit de les libérer en s’en remettant à Dieu. Par la complexité des rapports humains qu’entretiennent ses personnages, Bergman fait émerger le questionnement sur l’espace divin. La symbolique intégrée à l’image vient nourrir le propos et contribue à la signature du célèbre réalisateur. Mais il faut le dire, le film repose essentiellement sur les solides épaules de la comédienne Harriet Anderson ayant à incarner un personnage vivant constamment au bord du gouffre. Elle prête habillement sa folie d’actrice à celle de Karin et à lui insuffler des émotions à fleur de peau. Gunnar Bjõrnstrand en père égocentrique et habité par des secrets non dévoilés étonne une fois de plus par la largesse de sa palette d’interprète. Une autre belle réussite de la troupe suédoise!