Aux côtés de quelques autres, Woody Allen n'apparait dans son film qu'à l'occasion d'interview où il dit son admiration pour le méconnu Emmet Ray, guitariste de jazz talentueux que seul son contemporain Django Reinhardt surclassait, parait-il. Allen retrace la carrière éphémère de Ray, composant avec les quelques éléments biographiques dont il dispose autant qu'avec la légende.
Fulgurante la carrière d'Emmet Ray? On ne s'en étonnera pas. L'homme est immature et flambeur, sûre de son talent mais égocentrique et vaniteux. Il est même
maquereau
à ses heures! Sans doute ces traits de caractères ont leur part dans le peu d'enregistrements qu'à laissés le musicien.
Pour autant, la légèreté et la fantaisie avec lesquelles Woody Allen décrit le personnage qu'interprète Sean Penn nous le rendent bien moins détestable qu'attachant par son côté lunaire, par sa physionomie de figure de dessin animé. En occultant les effets de la Grande Dépression, en se détournant d'un réalisme humain rigoureux, le réalisateur s'attache à construire un personnage de comédie, que n'était sans doute pas Emmet Ray, un personnage sans passé ni futur, presque irréel, et d'autant plus que fugitif.
Forte de son élégante reconstitution des années 30 et de ses mélodies de jazz, la comédie repose sur un récit gracieux (à l'image de la compagne malmenée de Ray) et subtil, qui s'offre de temps à autres quelques incursions dans le burlesque.