Je suppose que je n'ai pas besoin de décrire la nouvelle vague, ni d'expliquer ce qu'est un film de la nouvelle vague. " Pierrot le fou ", " Le mépris ", " A bout de souffle " (pas la merde avec Richard Gerbe, non non), ce sont des films de la nouvelle vague, tout comme " Adieu Philippine ". Et même si on a eu des chef d'œuvre de la nouvelle vague, on a eu des belles merdes aussi, et entre les deux, on a eu des films qui auraient pu être marquant et qui valent quand même d'être vu, et c'est le cas du premier long métrage de Jacques Rozier qui n'a pas fait une grosse connerie avec son premier film, mais qui n'a fait que titiller de prêt tout ce qui aurait pu être intéressant et exploitable dans son film.

C'est l'histoire d'un mec nommé Michel. Michel est un parisien, et comme tous les parisiens, il habite à Paris (c'est pas con). Il lui prend de partir prendre ses vacances militaires en Algérie pour rejoindre le front pour quitter son boulot confortable à la télévision. Il s'amuse à draguer des filles (deux en même temps, tu parles d'une morale !), il achète une voiture, il dîne avec Borat, il tourne des pubs pour Berlusconi, il ne danse pas le techa techa techa, il part en vacance, il jette les auto-stoppeurs de sa voiture, il part en Corse, il prend son bateau FIIIIIN ! Jetons nous rapidement dans le contexte important pour le film : 1960, guerre d'Algérie, indépendance du Tongo, du Mali, du Sénégal, et de tout pleins d'autres, Khrouchtchev président, naissance de Hugh Grant et décès de Clark Gable ( et merde ), on a " Psychose " en Amérique et " La Vérité " en France.

Et que vient foutre " Adieu Philippine " là dedans ? Bonne question ami philosophe. Là où le film est très fort, c'est ce quasi paradoxe d'un sujet fort et important pour le film qui n'est pourtant jamais réellement évoqué. Le début du film impose le sujet : La guerre d'Algérie (qui à l'époque du tournage n'était pas finie). Du début jusqu'à la fin du film, la guerre d'Algérie n'est que très peu évoqué alors qu'elle est le point culminant de la vie de notre Michou qui s'en va en guerre. Que ce soit par le personnage lui-même par exemple dans la scène du spectacle aérien où il lui est prévu un grand voyage où il ne s'attarde pas dessus, ou alors entre les deux filles de son cœur en pleine discussion (Il va avoir de grosses chaussures pendant son service, c'est moche, les chaussures fines c'est mieux et bla bla bla on dévie sur la mode) et le passage le plus frappant c'est la scène du dîner où "Dédé" revient justement d'Algérie, et on s'en intéresse comme s'il était parti à Melun.


La guerre d'Algérie est ancrée de façon omniprésente dans l'esprit des gens, mais personne ne semble y penser réellement si ce n'est Michel. (Sachant aussi qu'on était en pleine guerre, difficile de s'étendre sur le sujet de la guerre en elle-même aussi). Seul Michel est concerné par son départ en Algérie, c'est lui qui s'en rappelle et le rappelle aux autres, même si on peut compter quelques allusions comme la guerre de sécession, ou bien la mise à mort filmée dans laquelle Michel s'implique lui-même en passant devant la caméra. Le comportement de Michel change tout au long du film, de plus en plus atteint par ce qui est inéluctable : son départ. Et cela peut aussi être son départ au sens dramatique du terme, après tout le film s'appelle " Adieu Philippine ", Philippine représentant les deux nanas (presque supportables) avec lequel il aura tenté de s'évader quelques instants avant son service.

Mais si le film peut paraître tout bien pensé, tout propre et tout bien comme ça, ça n'est pas le cas. Rozier n'est fait que planer à la surface de ses sujets tout au long du film. Alors certes, on a les taxis parisiens, on a les bistrots, les accordéons, les voitures achetées entre copains, les nanas avec les chapeaux de paille et les robes à fleurs, la ville et la campagne, oui on est bien au Paris des années 60, ça c'est beau, mais là où il y a erreur dans l'authenticité et la simplicité que veut donner le réalisateur à son film, c'est la qualité de ses acteurs qui n'en sont pas. Certains jeux sont tout simplement mauvais. On a même un peu de mal à s'attacher à Michel. Et outre le fait que Renaud semble doubler tous les personnages, certaines scènes sont mal coupées, certains doublages sont mal fait. Je ne doute pas qu'il y ait des choses remarquables dans ce film, mais il y en a aussi de très mauvaise, et ça jusqu'à la fin (nous jeter en pleine gueule à 300 Km/h le mot "FIN", est-ce bien raisonnable ?). Bref, sur la guerre d'Algérie, avec des personnages attrayants et attachants, on trouve mieux. Là on s'amuse, on voyage un peu, mais rien de bien prenant dans le fond, si bien qu'aussitôt fini, on ne se rappelle pas vraiment du film, rien n'est marquant, rien n'est traité, et on a un léger goût de vide en travers de la gorge.

Bon Film :)
P-D
6
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le 8 oct. 2014

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