Alors que sa sœur est en train de lui apprendre sa leçon, Alice s’évade dans le monde de ses rêves. Elle va y rencontrer de très étranges personnages, dans un univers défiant toutes les lois de la physique...


L’histoire est désormais bien connue, et doit une grande partie de sa notoriété à l’adaptation qu’en firent les studios Disney en 1951. Le constat est pourtant assez ironique lorsqu’on constate à quel point ce film, qui allait marquer l’imaginaire collectif de manière durable, fut décrié, tant par le public que par ses créateurs eux-mêmes. De fait, Walt Disney ne se gênera pas pour clamer son désamour vis-à-vis de ce film à la difficile gestation.
Car adapter l’œuvre de Lewis Carroll était un défi de taille pour un studio qui, jusque là, avait montré toute sa rigueur dans l’écriture de ses films. Or, contrairement à Cendrillon, qui pouvait s’appuyer sur l’expérience précédente de Blanche-Neige et les sept nains, Alice au pays des merveilles est une expérience tout-à-fait inédite pour Walt Disney et ses animateurs. Entrer dans le monde fou de Carroll, s’extraire du temps et de l’espace, s’approprier le non-sens britannique pour produire un film absurde en tous points étaient une gageure pour les animateurs Disney. Pourtant, le produit final est une réussite à tous ces différents niveaux. La collaboration avec Dali en 1946 (pour un court-métrage qui ne verra le jour que 60 ans plus tard) ouvra-t-elle la voie aux studios ? Le délire psychédélique douteux des Trois caballeros servit-il de coup d’essai ? Nul ne peut le dire, mais on retrouve en tous cas les caractéristiques de l’un et de l’autre, alliée à l’inventivité d’un Fantasia, dans cette version d’Alice.
De ses décors fous, essentiellement dus à l’imagination de la directrice artistique Mary Blair, employant des alliances de couleurs fantaisistes et jamais vues dans un Disney, à ses personnages délirants, Alice au pays des merveilles nous propose un long enchaînement de scènes mémorables, où l’on passe sans cohérence apparente d’un Morse et d’un Charpentier dévoreur d’huîtres à une Reine totalitaire jouant au croquet avec des flamands bleus ou verts en passant par un Chapelier Fou, une marche militaire de cartes à jouer, une chenille qui fume des lettres de l’alphabet, et un chat doté de la voix de Roger Carel qui apparaît et disparaît à sa guise.
Si les puristes britanniques de l’œuvre originale comme les néophytes américains ne se privèrent pas de reprocher au film ce manque de cohérence, ce choix apparaît pourtant avec le recul comme le meilleur, car c’est sans nul doute ce qui nous fait le mieux entrer dans un esprit d’enfance fantaisiste et détraqué qui, s’il fut celui de Lewis Carroll, fut également celui de Disney. La rencontre entre ces deux génies ne pouvait donc donner qu’une œuvre unique dans le monde du cinéma, et si elle n’est pas la plus accessible, Alice au pays des merveilles est en tous cas une magnifique pierre apportée à l’édifice grandiose que constituent les Classiques Disney. Avec Cendrillon, les studios Disney entraient dans un nouvel âge d’or. Avec Alice au pays des merveilles, ils ne faisaient que confirmer que leur créativité leur était revenue, intacte.

Tonto
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le 14 sept. 2017

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Tonto

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