Le sympathique western post-apocalyptique Steel Frontier m’a permis de faire la connaissance de l’acteur Joe Lara, dont la troublante beauté joua pour beaucoup dans l’appréciation du film. Sa carrière n’étant guère resplendissante, composée de téléfilms et de productions de série B sur une douzaine d’années, j’allais pouvoir éplucher sa filmographie avec une certaine curiosité.


Avec un tel titre, American Cyborg: Steel Warrior, qui semble piocher dans les termes les plus populaires des titres de vidéo-clubs des années 1980, le film est prometteur, pour qui n’attendrait pas un drame psychologique. Il est de plus estampillé Cannon, célèbre compagnie de productions de série B.


Car c’est le futur, et il a mal tourné. Après une Troisième Guerre Mondiale un peu trop nucléaire, la population est devenue stérile et contrôlée par des intelligences artificielles. L’ordre est assuré par des androides surpuissants qui ne font guère de sentiments.


L’un d’entre eux élimine ainsi toute une poche de résistance, mais leur dernier espoir arrive à s’enfuir, Mary. Cette dernière ne part pas seule, puisqu’elle a avec elle son enfant, ou plutôt un foetus viable, gardé en vie dans un charmant bocal (qui rappelle ainsi le jeu video de Kojima, Death Stranding). Elle a 36 h pour emmener à des résistants européens cette petite créature qui pourrait être le salut de l’humanité. Mais elle a ses trousses cet inflexible androide. La rencontre avec Austin lui laisse une chance, quitte à lui mentir pour qu’il la protége.


La course poursuite est musclée, le robot est coriace, se remettant assez bien des pires accidents que le duo arrive, tant bien que mal, à lui infliger. Les quelques moments de calme seront bien souvent interrompus par cette force de la nature qui adore passer par les murs ou envoyer les autres par-delà vitres et grillages. John Saint Ryan a la stature du rôle, bien que son accoutrement tout de cuir noir vêtu avec quelques pointes de métal puisse faire sourire au début, d’autant qu’il porte une petite moustache blonde, ultime vestige peut-être de son humanité (mais là j’extrapole). Mais son impassibilité et son inflexibilité lui vont bien, tout au plus agrémenté de quelques discrets levers de sourcils et de grognements pour exprimer ce qu’il lui reste d’émotions. C’est un curieux Terminator, avec moins de charisme.


Bien sur, le film inclut sa petite histoire d’amour entre Mary et Austin, un peu maladroite et attendue mais dont l’issue rappelera Steel Frontier. L’intérêt n’est pas là. C’est par contre une belle surprise de découvrir Nicole Hansen dans ce rôle féminin, à la fois charmante mais décidée, avec son innocence et en même temps une détermination sans faille. Malgré le cadre, elle est, comme on dit dans le milieu, “choupi”. Malheureusement, la prestation de Joe Lara déçoit un peu. Son personnage énigmatique dans Steel Frontier lui allait parfaitement. Il est obligé ici d’utiliser plusieurs émotions qui ne sont guère convaincantes, avec quelques belles grimaces de rigueur. Il incarne un héros de film d’action comme d’autres, même si sa belle chevelure (hélas avec bouclettes ici) et son beau regard lui permettent d’accrocher une nouvelle fois le regard, mais ce sont des atouts bien mal utilisés par le film.


La présentation du futur qui est faite n’est guère réjouissante, dans ce monde en ruines surveillé par les intelligences artificielles. Les quelques scènes où on peut voir la civilisation s’affairer ne sont guère réjouissantes, dans ce décor de béton. Le film a été tourné dans une (ou plusieurs) usines abandonnées, ce qui permet de bien ressentir l’abandon des lieux, et la décrépitude de notre ère. Le film compte un peu trop sur ce lieu de tournage, puisque l’oeil averti permettra de distinguer quelques soucis de cohérence, comme cette longue poursuite dans les égouts qui débouche, en fait, à peine quelques mètres plus loin. Mais ce lieu abandonné représente tout de même un judicieux cadre, il convient parfaitement.


Le film est d’ailleurs assez bien tourné, les quelques scènes de nuit qui ouvrent le film avec leur photographie bleue et grise sont assez belles, le reste du film se passant en journée sera plus classique, plus orangé. Mais le rythme du film tient la route, ponctué de scènes plus musclées qui se révèlent assez bien filmées. On pourra tout de même lui reprocher quelques trucages qui jurent tout de même.


On pourra s’étonner, voire s’amuser des directions christiques prises par un tel film. Rien qu’avec le personnage de Mary, jeune femme dont on ne connait pas le géniteur mais dont l’enfant doit sauver l’humanité. On peut même supposer qu’elle est vierge, puisqu’elle avoue n’avoir jamais embrassé quelqu’un, et qu’elle se révèle assez innocente. Elle sera même à un moment crucifée par de vilains cannibales, parmi encore d’autres détails.


Le film est réalisé par l’israélien Boaz Davidson (qui refera le coup du post-apo avec LunarCop puis sera producteur des Rambos et des Expendables dans les années 2000-2010). Il a été tourné à Tel-Aviv. Ce sera même l'un des derniers films de la célèbre compagnie Cannon, célèbre pour ses films musclés de série B, appartenant aux producteurs d'origine israélienne Menahem Golan et Yoram Globus. Alors pourquoi incorporer de tels liens qui rappeleront plus le Nouveau Testament que l’Ancien ? L’idée n’est pas mauvaise, le mélange étonne, mais il y a un mystère qui ne sera pas éclairci dans cette critique, j’en ai bien peur.


Un peu de Mad Max, un peu de Terminator, et même un peu de parallèles chrétiens, Steel Warrior peut se vanter de quelques bons points, à l’image de ces décors, de sa réalisation ou des prestations de ses acteurs. Mais il ne se révèle guère original, avec un scénario déjà vu ailleurs (et dont il conviendra de ne pas se faire spoiler son seul rebondissement). C’est une production pour vidéo-clubs, malgré tout assez entrainante, on pourra se reposer dessus pour l’apprécier.

SimplySmackkk
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le 14 juil. 2020

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