[J'ai tendance à spoiler, ne vous offusquez pas, vous êtes prévenus].
Il est plutôt rare que j'aille voir au cinéma un film dont je n'ai consulté ni synopsis ni bande-annonce. C'est à peine si j'avais regardé l'affiche en rentrant, juste le temps de voir la trogne d'un mec masqué me faisant les gros yeux, l'air de dire qu'on va se revoir et qu'il va m'en faire baver. Une heure et demie plus tard, je ne sais toujours pas exactement quel film j'ai vu.
Placé à la limite brumeuse et indéfinissable entre le thriller et le genre horrifique, American Nightmare offrait de belles promesses dès l'ouverture : cadre d'anticipation dans une Amérique futuriste où la science semble avoir définitivement triomphé au mépris de toute valeur humaine ; univers glauque et macabre à souhait ; relations de voisinage superficielles, hypocrites et complètement stérilisées, quartier ultra-sécurisé et protagonistes bien trop sûrs d'eux. Ces ingrédients mis en place, et le rideau tombé (le rideau de fer ceignant la maison, j'entends), ô joie ! J'anticipe déjà les frissons d'une histoire en huis-clos, dans cette maison aux multiples placards et recoins derrière lesquels je vois déjà des visages meurtriers et tordus par la haine surgir.
Quelle déception.
Rien n'est abouti.
Le réal hésite en permanence entre l'action en huis-clos et l'oscillation entre l'intérieur et l'extérieur par le biais de la caméra, pour au final foirer les deux.
L'ambiance de siège censée faire monter la tension à son comble est si mal gérée que je me dis qu'on aurait tout aussi bien pu la couper au montage ou la prolonger de trois heures sans un iota de différence.
La présence d'un intrus dans la maison, qui aurait pu doubler la tension du film, est réglée en cinq minutes chrono en main.
Tout le passage sur le petit-ami de l'adolescente attardée est inutile. Ne parlons même pas du plus petit sentiment de rancune entre elle et son père, dont vous savez les multiples possibilités qu'il aurait offert : il n'existe pas.
Le robot téléguidé du mioche, infrarouge, silencieux et tout le tralalala, qui offre les seuls frissons du film, est trop sous-utilisé pour présenter un réel intérêt.
Le rituel final des voisins, joignant les paumes, est trop vite galvaudé pour qu'aucune dimension mystique à l'acte ne puisse se mettre en place.
Enfin, la brièveté du combat final est telle que c'en est à se demander l'utilité de passer trois plombes à installer l'ambiance dans cette si grande demeure.
Je ne vais pas refaire toutes les promesses non tenues du film, puisqu'il faudrait presque le reprendre minute par minute. Toujours est-il qu'il s'agit, en rapport avec son ouverture, d'une immense déception. Beaucoup de bonnes idées, presque aucune (pour être gentil) d'exploitée.
Quelques points positifs tout de même. Le chef de la bande costumée est absolument génial dans son jeu. Dommage qu'on le voie si peu. De même, le plan des pieds dansant dans le couloir, encadrés par deux sabres virevoltant à la mesure du pas, est sûrement l'une des meilleures inspirations du réalisateur, et sa construction est la plus proche de ce que devrait être ce film. Enfin, l'idée de départ du scénario est quand même carrément mortelle.
N'étant ni cinéphile confirmé, ni bonne plume, je vais m'arrêter là ; en vous conseillant tout de même, bizarrement, de le voir, mais si possible sans lui verser un denier. Simplement parce que c'est le genre de film qu'il faut avoir vu, pour mesurer dans la douleur à quel point il aurait pu être grand.