En moins d’une heure, Nathalie Labarthe retrace la fructueuse et tumultueuse relation artistique entre l’acteur espagnol et son pygmalion qui a lancé sa carrière. Ce documentaire d’Arte met en lumière cette relation professionnelle mais nous en apprend curieusement plus sur Antonio Banderas que sur le cinéaste espagnol.
Il faut reprendre depuis le début. Antonio Banderas et Pedro Almodóvar ont des origines sociales et des débuts diamétralement opposés. A priori rien ne pouvait les réunir. Almodóvar vient d’un village, et d’un milieu modeste. Banderas vient d’Andalousie et d’un milieu légèrement plus aisé. Almodóvar fait des films libres et libertaires. Banderas suit une formation théâtrale classique. Pourtant ils vont se rencontrer, puisque le cinéaste espagnol l’impose d’abord dans cinq de ces films, dont l’excellent ‘Attache-moi’. Almodovar lance la carrière de l’acteur et voit en lui un idéal et double masculin. Pourtant, leurs carrières vont partir dans des directions diamétralement opposées.
Dans une séquence à la fois drôle et gênante, Banderas se fait remarquer par Madonna (dans le cadre du documentaire centré sur la chanteuse ‘In bed with Madonna’). Hollywood lui fait des propositions. Almodóvar le prendra très mal et à partir de ce moment-là, leurs destinées divergent. Almodóvar signe des films plus classiques (comme le remarquable ‘Volver’) et devient un cinéaste acclamé et oscarisé. De l’autre côté de l’Atlantique, la star espagnole a une carrière moins heureuses. Malgré le très bon ‘Philadelphia’ de Jonathan Demme et le plaisant ‘Le Masque de Zorro’ de Martin Campbell, l’acteur enchaine les nanars (voir le ridicule remake de la ‘Sirène du Mississipi’ de François Truffaut : ‘Péché originel’ avec Angelina Jolie). Banderas est le latin lover, l’espagnol de service à Hollywood. Cela rend fou Almodóvar.
Pourtant, quand Almodóvar cherche un acteur pour jouer son double dans ‘Douleur et gloire’, il ne pense qu’à Antonio Banderas. Cette réconciliation sera plus que fructueuse. ‘Douleur et gloire’ fut un triomphe et l’interprétation de Banderas fut louée (Prix d’interprétation à Cannes et nomination à l’oscar du meilleur acteur en prime). Leurs retrouvailles avaient pourtant mal commencé. Sur le tournage du ‘[El] piel que habito’, ça s’était mal passé. Le réalisateur reprochant à l’acteur ses tics de jeux américains.
Le portrait le plus intéressant dans ce documentaire n’est pas celui d’Almodóvar. Il faut admettre qu’on n’apprend pas grand-chose sur le maître ibérique. En revanche, celui de Banderas vaut le détour. Ce n’est pas un acteur que j’aime énormément. Mais là, on le redécouvre humble et modeste, faisant preuve d’une certaine lucidité sur lui-même et sur sa carrière.
Le documentaire pourra également plaire pour le côté très ‘people’. Il est vrai que l’on ne compte plus les brouilles entre artistes. La plus mémorable étant celle entre les grandes actrices américaines Bette Davis et Joan Crawford.