La thématique de l’adolescence est prégnante dans la littérature et ce film est l’adaptation du roman de Benjamin Alire Sáenz, écrivain américain du Nouveau-Mexique, publié en 2012.
Je n’ai pas encore lu ce livre, car j’en découvre l’existence grâce à la réalisation de Aitch Alberto qui en reprend le titre à la lettre près.
L’histoire est simple. Elle narre le développement, pendant l’année 1987 et son vent de liberté, d’une amitié entre deux ados d’une quinzaine d’années qui se construit par une altérité qui déclenche, en salves successives, les questionnements socratiques du « connais-toi toi même ».
Si le sujet abordé n’est pas original, ayant déjà été traité maintes fois, cela lui confère néanmoins un statut quelque peu universel et dont tout l’intérêt consiste, pour le spectateur, à découvrir comment la cinéaste parviendra à le réitérer une nouvelle fois mais tout en renouvelant ses formes artistiques afin d’en éviter une vaine répétition sans intérêt.
Et c’est ici, justement, où Aitch Alberto m’a épaté. Elle parvient d’emblée, par des références culturelles discrètes et des associations d’idées fulgurantes, à nous captiver. Sa sagacité nous conduit à ressentir rapidement sa justesse cinématographique dans la traduction délicate des sentiments et des situations.
Ainsi, lorsque les deux ados se rencontrent pour la première fois à la piscine, Aristote dit à Dante, « appelle moi Ari, tout le monde m’appelle Ari ». On pense alors en un éclair au film de Rainer Werner Fassbinder « Tous les autres s’appellent Ali »…
De même, au moment où Dante apprend à nager à Ari, il y a un plan, en contre plongée, sur un angle de la piscine qui évoque le tableau de Hokney "A Bigger Splash ". C'est la reproduction des mêmes teintes, dans la même géométrie, et donnant l’évocation rapide de la même atmosphère…
Un peu plus loin dans le film, Dante dira d’ailleurs à Ari : « Certaines peintures sont comme des romans »…
Enfin, la cinéaste parvient à symboliser le coeur problématique du récit en transmutant les images d’une nage, sous l’eau profonde du bassin qui semble devenir à l’écran comme du liquide amniotique dans lequel les mouvements de Ari et Dante ressemblent à ceux de jumeaux dans le foetus maternel, ce qui évoque pertinemment l’intensité de leur attachement et la probabilité qu'il puisse se révéler en un amour partagé.
Cette scène ouvre vers celles qui conduiront à l’épilogue de cette quête, avec parfois un ton moins maîtrisé.
La scène finale est gratifiante, car elle nous offre enfin une étreinte et un baiser amoureux entre les deux beaux garçons.
Finalement, les mots extraits d’un poème de François Mauriac, dédié à son ami André Lafon sont au diapason des dernières images de cette production :
« Tu marches vers des mains, des lèvres, un regard,
Vers l’amour que contient ce qui te reste à vivre ».