Ce classique du film de procès a quelque chose d'imparable. J'allais dire d'imparable et d'ennuyeux mais ce n'est pas tout à fait ça. Pas exactement du moins car le film est bon. Un film rasé de près. Le film est, dans sa facture classique, son découpage au cordeau, un modèle du genre. Quelques touches de légèreté (l'élégance de Jimmy Stewart, la musique de Duke Ellington, la vie comme elle va à Thunder bay) s'égrènent tout au long de 2h40 de maîtrise pleine et entière. Jamais le film ne prend les chemins de traverse ou alors il revient bien vite dans les rails voulus par Preminger. Il y a les personnages, le décor planté, des doutes savamment dosés pour les spectateurs et puis le procès qui fait très intelligemment l'économie de la plaidoirie finale. Le spectateur bataille en même temps que l'avocat qui cherche à convaincre et démontrer. Il y a l'intelligente mise en scène notamment dans la salle du tribunal, le jeu sur les champs/contre-champs, le jeu sur la mise au point (Stewart, flou, en arrière plan, cherchant à s'imposer dans le champ de vision du témoin à la barre), la caméra savamment placée, les cadrages soignés. Anatomy of a murder pourrait très bien être une démonstration de cinéma, une sorte de "leçon" et c'est à ce titre, j'imagine, que le film qui déroule son programme revêt un je-ne-sais-quoi de bon, d'imparable et d'ennuyeux.