Caleb, jeune paysan de l'Arizona, essaie de séduire Mae en l'emmenant faire un tour dans son pick-up. Au fur et mesure que la nuit s'étire, Mae se fait de plus en plus mystérieuse quand son baiser se transforme en morsure. À l'aube, elle disparaît. Le jeune homme tarde à comprendre son nouvel état... de vampire. Il est sauvé de l'insolation par une bande errante composée de Jesse, qui a fait la guerre de Sécession, sa petite amie Diamondback, un mauvais garçon, Severen, et un enfant, Homer...


J'ai eu l'occasion de parler du film Dracula (1992) de Francis Ford Coppola en évoquant le fait que le film de vampires était presque toujours resté sur les mêmes rails, suivant un modèle narratif auquel il n'a dérogé qu'à travers des productions qui le plus souvent ne comptent pas parmi les plus mémorables. À l'exception que représente le Génération perdue (The Lost Boys ; 1987) de Joel Schumacher, on peut ajouter Aux Frontières de l'aube qui, justement, sortit la même année que le précédent. Notons au passage que ces deux productions se trouvent dans l'esprit de leur temps, une époque de postmodernisme, c'est-à-dire de mélange des genres, pour simplifier à l'extrême ; dans Génération perdue, le thème des vampires se mêle à celui de la délinquance, alors que dans Aux Frontières de l'aube il compose avec celui de la famille.


D'un certain point de vue, d'ailleurs, c'est à peu près la même chose puisque le groupe de délinquants sert souvent de substitut à sa cellule familiale bancale pour le jeune mal inséré dans la société. C'est à y regarder de près la seule véritable différence entre Caleb et les motards de Génération perdue : Caleb, lui, n'a pas de problème particulier avec ses parents ; mieux, il est un chaînon central de son foyer, un maillon pour lequel son père et sa sœur se lanceront dans une recherche éperdue – leurs efforts, d'ailleurs, permettront à Caleb de retrouver ce chemin qu'il a momentanément perdu de vue... Pour cette raison, Aux Frontières de l'aube s'avère en fait assez conventionnel, du moins en regard de ce puritanisme dont le cinéma américain souffre assez souvent.


Un conventionnel qu'on retrouve d'ailleurs dans l'aspect formel de ce film. Tout entier situé au sein de ces vastes étendues désertiques de l'Arizona, soit l'un des nombreux symboles de l'Amérique traditionnelle, il affiche ses couleurs dès le départ : celle d'une carte postale des États-Unis, voire même presque une image d'Épinal – dans le sens « cliché » du terme. Toute son originalité tient dans ce qu'il place au sein d'un tel décor une intrigue de récit de vampires puisque à ma connaissance on n'en vit jamais dans ces régions jusqu'à cette production ; du moins, ce n'est pas le genre d'image qui me vient à l'esprit quand on prononce le nom commun des êtres surnaturels buveurs de sang...


Voilà peut-être pourquoi il connut moins de succès que Génération perdue, d'ailleurs, parce qu'à ce décorum traditionaliste il rajoutait une atmosphère qui l'était tout autant, alors que l'autre combinait l'ambiance toujours un brin déjantée de la Californie au rock et aux motos. Pourtant, c'est aussi ce qui fait d'Aux Frontières de l'aube un film plus intimiste, faute d'un meilleur terme, ou en tous cas moins grand spectacle, moins simple, moins naïf... Au drame d'un jeune homme qui devient vampire sans l'avoir voulu, il rajoute celui d'une famille menacé d'éclatement.


C'est d'ailleurs ce qui permet au protagoniste principal d'atteindre une véritable stature de héros puisqu'il est le point central de ce foyer menacé d'explosion : cette manière d'en faire le centre du récit dénote une habileté narrative assez rare, surtout dans le registre du film d'horreur dont l'audience se montre en général friande de symbolismes plus... directs.


Récompenses :



  • Festival international du film fantastique de Bruxelles : Corbeau d'argent.

  • Festival international de Paris : Licorne d'or.


Notes :


Les fans d'Aliens le Retour (James Cameron ; 1986) retrouveront avec plaisir les comédiens Bill Paxton (le marine William Hudson), Lance Henriksen (l'androïde Bishop) et Jenette Goldstein (le marine Jenette Vasquez).


Eric Red, qui participa à la rédaction du scénario, retravailla avec Kathryn Bigelow sur le film Blue Steel sorti en 1990.


Le mot vampire n'apparaît à aucun moment dans le film.

LeDinoBleu
6
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste Fantastique

Créée

le 5 août 2011

Critique lue 696 fois

5 j'aime

LeDinoBleu

Écrit par

Critique lue 696 fois

5

D'autres avis sur Aux frontières de l'aube

Aux frontières de l'aube
cinemusic
8

Les mordus de la nuit.

Caleb (Adrian Pasdar), un jeune fermier, rencontre Mae (Jenny Wright). Ebloui par sa beauté, il tente de la séduire. Mais ce qui ne devait être qu'un baiser va se transformer en morsure dans le cou...

le 10 mars 2022

13 j'aime

13

Aux frontières de l'aube
Buddy_Noone
8

Voyage au bout de la nuit

C'est durant les années 70 et 80 que la figure du vampire connut une de ses plus profondes mutations. Une auteure américaine, Anne Rice, bouscula alors durablement cet archétype avec la parution de...

le 20 mai 2019

13 j'aime

5

Aux frontières de l'aube
Elvangar_Captures
5

Pas convaincu ... et encore moins mordu.

Aux frontières de l'aube est, semble t-il considéré comme l'un des meilleures relectures du mythe vampirique ... relecture qui ne m'a aucunement convaincu. Tout d'abord, l'histoire est très épurée,...

le 20 août 2014

11 j'aime

1

Du même critique

Serial Experiments Lain
LeDinoBleu
8

Paranoïa

Lain est une jeune fille renfermée et timide, avec pas mal de difficultés à se faire des amis. Il faut dire que sa famille « inhabituelle » ne lui facilite pas les choses. De plus, Lain ne comprend...

le 5 mars 2011

45 j'aime

L'Histoire sans fin
LeDinoBleu
8

Un Récit éternel

À une époque où le genre de l’heroic fantasy connaît une popularité sans précédent, il ne paraît pas incongru de rappeler qu’il n’entretient avec les légendes traditionnelles qu’un rapport en fin de...

le 17 août 2012

40 j'aime

Capitaine Sky et le Monde de demain
LeDinoBleu
8

Pulp (Science) Fiction

La science-fiction au cinéma obtient rarement l’assentiment des amateurs du genre dans sa forme littéraire, parce que cette dernière privilégie les idées et les émotions au spectaculaire et aux...

le 31 juil. 2011

33 j'aime

8