Un énorme gâchis signé James Cameron

Avatar premier du nom est un film qui ne laisse pas indifférent, n’en déplaise aux « critiques » faciles qui affirment que le film n’a rien. Que ce soit les effets spéciaux, la créativité des décors, les personnages, ou encore, évidemment le plus important, l’histoire et ce que celle-ci véhicule, tout fait du premier film un film très intéressant. Il ne sera bien évidemment pas au goût de tous, notamment pour son histoire qui est assez classique, mais le fait qu’une histoire soit classique ne la rend pas intrinsèquement mauvaise, tout dépend de la manière dont elle est exécutée. Et c’est pour moi la force du premier, au même titre que les effets spéciaux qui, bien qu’étant la raison principale pour laquelle le film a connu ce si grand succès, n’a pas fait passer dans le subconscient collectif ce film de « mauvais » à « bon ».

Alors, ce 2ème film, annoncé dès 2015 et censé sortir en 2016, je l’ai attendu, avec une certaine hâte. Bien que cette suite ne me semblait pas utile, je ne doutais pas du fait que l’histoire et les visuels allaient être remis au goût du jour de manière tout aussi spectaculaire, et raconter une histoire plus originale que la précédente, et donc meilleure, grâce à son réalisateur. Qu'en est-il alors ? … la plus grosse déception cinématographique de ma vie.

Parce qu’en fin de compte, la seule utilité du film, et c’est triste à dire, ce sont ses effets spéciaux ; bluffant de réalisme, ils nous transportent sans soucis dans un monde nouveau, nous permet de nous imaginer sans soucis aux côtés des nouvelles tribus, faunes et flores, et technologies. Chaque plan est pensé pour nous en mettre plein la vue, et ça marche ! Mais quid de l’histoire qui est racontée ? Je ne sais pas, parce que les 400 millions de dollars de budget semblent se consacrer uniquement sur ça. Quand je dis que le film est conçu davantage pour nous en mettre la vue, c’est dans le sens que je pense sérieusement que chaque plan est conçu pour montrer les prouesses techniques dont James Cameron est capable, et/ou la beauté des plans, mais sans plus, et pour moi cela s’illustre par le fait que tous les plans s’enchainent trop vite.

Parce que pour un film de 3h10, on a le temps de ne rien voir. On enchaine chaque plan pour te montrer la plus grande diversité d’image sans prendre réellement le temps de s’y attacher ou d’y ressentir quoi que ce soit ; parce qu’être bluffé, surpris, ça n’est pas une émotion, et par conséquent ça ne permet pas de ressentir quelque chose de concret. Mais là je parle surtout de visuel, mais le problème, c’est que de la même manière que toutes les images s’enchainent, tout le scénario s’enchaine comme s’il n’avait rien à raconter, alors qu’ironiquement il se lance sur beaucoup d’idées… trop d’idées, et franchement pas les meilleures.

Je veux dire, parlons du début ; 20 ans de vie sans les humains, avec la famille de Jake Sully, résumé en 5 minutes ? Sur un film de 3 heures 10 ? Vous n’avez pas l’impression que c’était quelque chose d’assez important pour être développé ? Et cette logique, on la met à toutes les sauces ; que ce soit les personnages, les intrigues, les relations, l’illustration du décor, tout passe trop vite, et aucune substance ne se créée. Ce qui est terrible, c’est qu’absolument personne n’a de personnalité, si ce n’est la fille adoptive qui se résume au fait qu’elle soit connectée avec Eywa, et peut-être Lo’ak qui fait sa rencontre au milieu du film, mais tu enlèves ça et il ne leur reste que leurs caractéristiques principales, et tous les autres personnages, même ceux développés dans le film précédent, n’ont plus aucune substance.

Jake Sully ? Il doit protéger sa famille, Neytiri ? Elle aime ses enfants. Neteyam ? Existe. Tuk ? Existe. Chefs de la tribu ? Existent. Le méchant ?... leurs fonctions dans le scénario ne se résume qu’à être dans la continuité et/ou suite logique du film précédent. Comment voulez-vous ressentir quelconque immersion ou plaisir dans ce film si les protagonistes font au mieux acte de présence, et au pire sont des cailloux ?

Et si ça ne se limitait qu’à ça, ce serait déjà pénible, mais en plus ils répètent les pires stéréotypes du cinéma sans même être amenés ni traités correctement. Les parents se fâchent contre leurs enfants plusieurs fois dans le film pour rappeler qu’ils sont les figures parentales, les garçons sont des têtes brûlées qui n’obéissent pas aux ordres (et appellent leur père « chef », je ne sais même pas si c’est expliqué mais à la longue ça devient barbant, parce qu’on n’a pas l’impression que ça montre une distance émotionnelle mais juste que c’est un moyen de communication de base, et donc sans consistance), les garçons de la tribu sont des connards débiles, les filles sont connectées à la nature, ou pire, servent de love interest sans même que le moindre amour concret ne soit affiché à l’écran… c’est osé de dire « toi tu sers à aimer » et ne jamais l’utiliser pour aimer putain.

Et il en est de même pour les situations qui auraient pu amener des récits intéressants ; l’interaction entre Lo’ak et son « ami » est traité de manière pitoyable, mal amenée et mal traitée, faisant au mieux rire dans certaines situations (leur premier « échange »… écrit par un maternel) ; c’est « How to train your Dragon » en médiocre. De même pour la morale écologique qui est traitée de manière superficielle et avec un lien avec l’intrigue centrale tirée par les cheveux, l’antagoniste et son équipe qui semble faire jeu à part tant son rapport avec le film est anodin et sa présence pertinente qu’au bout de la 2ème heure.

Alors critiquer le 1er film sur la non originalité du récit en disant que c’est du « Pocahontas en bleu », c’est profondément stupide, mais là il n’y a rien à défendre, car l’intrigue se base sur tous ces récits que je vous raconte, mais sans les mettre en valeur, se contentant de les placer par-ci par-là, sans nous faire vivre d’histoire, et encore moins d’émotions.

Des tas de choses auraient pu être faits pourtant ; ne pas hésiter à prendre 30 minutes pour raconter l’histoire de la famille Sully et le retour des humains sur Terre (de la même manière que la scène de l’effondrement de l’arbre était impressionnante dans le premier film parce qu’on a eu le temps de voir la tribu qui vit dedans, les espèces, les familles… et qu’après une heure ou l’on c'est attaché, on ne voit pas un arbre mais un peuple mourir. Là on a eu toute la forêt brulée en 10 secondes. Bon), montrer des humains empli d’un esprit de revanchisme absolu suite à leur humiliation et leur nécessité toujours plus grande de s’emparer de l’unobtanium pour que l’humanité survive (intrigue littéralement placé sous la trappe d’ailleurs), développer les personnages (…), aller au bout des idées mises en places en créant un vrai lien amoureux entre les 2 personnages concernés qui pourrait permettre un parallèle avec le film précédent sur la relation de Jake et Neytiri tout en apportant des nouveautés, si bien amenées, montrer un méchant encore plus fou que jamais mais pris au piège par sa nouvelle condition et qui développe un lien toxique et en même temps affectif avec Spider, jouer davantage sur le mystère entourant Kiri, montrer qu’au-delà de la famille de Sully il s’agit avant tout de l’histoire de tribus et d’individus qui, dans leurs singularités, composeraient une sorte de tout, et qui pourrait être 1000 fois plus pertinente, car là on aurait pu voir une belle histoire, nous racontant quelque chose de pas juste visuellement beau, mais émotionnellement beau, qui nous touche tous, et qui est donc un bon art.

Mais ce n’est pas le cas, car ce n’est pas juste une suite sans faveur que nous avons ; c’est un cahier des charges, ou James Cameron c’est assuré de montrer le plus large éventail possible de sublimes images, des messages de paix et d’écologie abordés de la manière la plus large qui soit pour que tout le monde puisse s’y retrouver et ainsi légitimer la création des prochains avatars. Sauf qu’on ne regarde pas Avatar 2 pour avoir les 4 et 5, mais bien pour avoir Avatar 2. Ce film aurait pu être une œuvre d’art s’il avait daigné nous dire quelque chose de beau plutôt que de nous montrer quelque chose de beau.