Responsable d’un accident malencontreux qui a été pris par les Romains pour une tentative de meurtre sur un tribun romain, Judah Ben-Hur (Charlton Heston) est considéré comme un criminel, et envoyé aux galères. Mais la vengeance qu’il cherche à accomplir sur son ami d’enfance, Messala (Jack Hawkins), artisan de sa chute, va le faire survivre et le mener jusqu’à Jérusalem, où les deux ennemis vont laisser libre cours à leur rivalité au sein de l’arène. Au même moment, un homme de Judée, à la prédication peu commune, exhorte les foules à aimer leurs ennemis et à leur pardonner, et acquiert une influence de plus en plus grande, qui inquiète les Romains…


Succès monumental en 1959 qui permit à la MGM de se renflouer en conséquence, le Ben-Hur de William Wyler (secondé par des réalisateurs de talent, tels que Richard Thorpe et Sergio Leone) fait partie de ces classiques indémodables à la jeunesse éternelle. Aujourd’hui encore, si certaines séquences ont légèrement vieilli, le tout se regarde avec une facilité déconcertante, tant le réalisme du film parvient à éviter presque toujours le kitsch de mauvais aloi qui pouvait contaminer certaines superproductions hollywoodiennes de l’époque, bien qu’il n’évite pas toujours l’écueil de la théâtralité. Ici, très peu de séquences ont vieilli dans leurs effets visuels, et certainement pas la course de char, sans doute la scène la plus épique du film, qui égale (pour ne pas dire qu’elle fait mieux !) en ampleur et en réalisme tout ce qu’on peut faire aujourd’hui.
Mais outre le grand spectacle que Wyler nous offre et dont on se délecte chaque instant, Ben-Hur se caractérise aussi par une profondeur incroyable, et notamment dans sa manière d’aborder la religion chrétienne, ainsi que les valeurs de paix, d’amour, de pardon et de foi que celle-ci diffuse. Ici, elles sont traitées sans aucune naïveté et sans aucun manichéisme, fait suffisamment rare pour être souligné, quoique le cinéma de cette époque témoignait souvent de plus d’audace et de liberté lorsqu’il évoquait la religion que le cinéma actuel, ne péchant pas par excès de laïcité comme un trop grand nombre de films contemporains. L’idée la plus magistrale du film est sans doute la décision de ne jamais montrer le visage de Jésus : ainsi, il conserve tout le côté imposant, noble et mystérieux, qui devait caractériser cet homme « qui est certainement plus qu’un homme », comme le dit la mère de Ben-Hur. La présence du Christ apparaît alors aux yeux du spectateur à travers les visages de ceux qui voient le sien, qu’ils soient transfigurés (Ben-Hur à qui Jésus donne à boire, Esther écoutant sa prédication…) ou décontenancés (le centurion qui veut interdire à Jésus d’abreuver Ben-Hur, mais qui recule de honte), superbe manière d’aborder en toute pudeur la foi et les effets que celle-ci produit à travers ceux qui marchent à la suite du Christ, mais également à travers la réaction de leurs ennemis.
Ainsi, le film parvient à mêler à un goût prononcé pour le spectaculaire, voire le grandiloquent, une sobriété qui lui fait honneur, parfaitement servie par des acteurs au jeu d’une justesse incroyable. Et même pour peu qu’on soit allergique à la religion, il faudrait tout de même être de mauvaise foi pour ne pas se laisser séduire par un film qui ne recule devant rien pour nous en mettre plein les yeux, et qui atteint son but à tous les niveaux : mise en scène d’une ampleur inégalable, partition wagnérienne de Miklós Rózsa, personnages remarquablement écrits, sans aucun manichéisme, jeu sans faille des acteurs, et même doublage français excellent, la traduction des dialogues ayant été faite par Jean Anouilh en personne… Tout cela fait des 3h45 du film une durée presque trop courte lorsqu'on arrive au terme d'une telle épopée !
Alors, Ben-Hur, « le plus grand film de l’histoire du cinéma », comme le prétend le slogan de l’affiche ? Sincèrement, après l'avoir vu, comment peut-on encore en douter ?

Tonto
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le 1 oct. 2016

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Tonto

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