Il reste effrayant de voir (et écrire une critique sur) les mêmes films Marvel collectionnant les mêmes tares, les mêmes personnages, le même humour infantile, les mêmes défauts de narration, de rythme, de CGI, de cinématographie. En l'an de grâce 2021, Marvel n'est plus à présenter, l'écurie tirant encore et toujours sur la corde pour exploiter son filon jusqu'à ce que le public s'en lasse un jour. Est-ce que ce jour est imminent ?
"Un pas de plus vers le bord" chantait feu Chester Bennington.
À l'heure actuelle, on se retrouve devant un projet de longue date, forcément réécrit depuis sa mise en chantier, ardemment désiré par les fans, passé de mains en mains pour débouler sur les écrans après plusieurs reports dus à la pandémie. Résultat : Marvel arrive encore à retenir l'attention du spectateur, ici par le biais d'un scénario en soi galvaudé mais bien plus violent et sérieux dans le fond que ses habituelles frasques insignifiantes et délivre une poignée de séquences dynamiques qui rendent le métrage dans son ensemble satisfaisant, un joli spectacle à moitié creux en somme.
Est-ce que Black Widow est un épisode filler ? Aucun doute. Est-ce qu'il va être oubliable dans deux ans ? Même réponse. L'apparition finale du personnage campé par Scarlett Johansson reste bien entendu décevant, de par sa forme, son histoire familiale ratée, les sempiternels gags dispensables (ici orchestrés par un pathétique David Harbour) venant constamment désamorcer des moments forts, les scènes d'action illisibles charcutées au montage, la caractérisation de bad guys délébiles, la mise en scène impersonnelle d'une Cate Shortland principalement enrôlée pour son sexe (rappelons que Marvel est sous la coupe de Disney).
Black Widow reste un produit, un produit profondément inégal qui ne va, comme d'ordinaire, jamais au bout de ce qu'il entreprend. On s'ennuie autant qu'on reste ravi devant la formule éculée depuis maintenant 13 ans, on apprécie l'implication des actrices (notamment Florence Pugh) tout en enchainant les facepalms devant le rendu de leurs personnalités de gamines se crêpant le chignon, on s'intéresse à cette histoire de familles d'espions russes nationalisés américains tout en pouffant devant le mauvais accent russe requis par la production, on adore les idées imaginés par les scénaristes tout en ne comprenant pas comment on peut autant rendre le tout aussi incrédule au final.
La formule s’essouffle de plus en plus, fatigue même, ne surprend depuis belle lurette plus, agace. Black Widow aurait pu être un bon film d'action s'il n'était pas confié à quelqu'un qui n'a jamais approché ce domaine, aurait pu être une bonne alternative aux pantalonnades du studio si ce dernier osait concrètement le renouveau. Encore une fois (jusqu'à la dernière), un produit rageant, imparfait, irrégulier mais pas totalement dénué d'intérêt. Quant à Scarlett Johansson, elle fait un bien piètre adieu à son personnage.
"Et je suis sur le point de craquer."