Dans la grande catégorie des suites tardives ou exploitation de licence qui n’ont pas été demandé, on peut trouver beaucoup de films qui ont vu le jour à l’aube de ce vingt-et unième siècle et malheureusement un paquet de projet dispensable quand ça ne sont pas des erreurs filmique qu’on aurait aimé ne pas vivre (à Hollywood comme chez nous) : Independence Day Resurgence, Les Bronzés 3 (cette abomination), Star Wars VII : Le réveil de la force, le reboot de SOS Fantôme, Indiana Jones : le royaume du crâne de Cristal et en principe ce ne sont pas des projets qui sont portés dans le cœur des gens. A quelques notables exceptions comme T2 : Trainspotting de Danny Boyle.


Le projet Blade Runner 2049, a été plus évident dans les années 2010 à partir du moment où le papa du Blade Runner original s’est engagé comme producteur et que la suite fut officialisé rapidement par la suite, Ford revenant pour le rôle de Deckard et Denis Villeneuve, sortant de son intrigant The Enemy, sélectionné comme réalisateur. Et avant sa sortie, l’entreprise se parfumait d’une douce odeur de réussite petit à petit, le soin semblant être le mot d’ordre : à l’image du court-métrage promotionnel Blade Runner 2022 : Black Out (signé Shinichirô Watanabe, l’auteur de certains court-métrages Animatrix mais aussi de la superbe série d’animation Cowboy Bebop).


Ce qui fait du bien avant tout avec cette suite au classique de SF, c’est qu’il fait preuve d’une grande compréhension avec les thématiques explorées par le premier film et trouve le moyen de mener son récit avec un approfondissement pertinent mais en évitant toute forme de fanservice. Le principal du film se focalise logiquement sur l’enquête mené par l’agent K, le Blade Runner Réplicant et ce qu’il apportera tant au personnage qu’à l’approfondissement des sujets du premier opus.


A commencer par le thème de l’humanisation des robots, qui ne passent plus seulement par la manifestation des émotions et sentiments chez les Replicants : mais par deux autres thèmes clé du film.


La première est la procréation, car elle marque un tournant important sur la relation entre les humains et robots, déjà très tendues et chaotique dans cette univers mais qui pourrait marquer une chute inexorable de la société humaine si cela venait à être rendue public.


Un sujet face auxquels les réactions sont étudiés de manière, je trouve, habile et suffisamment bien pensé pour tenir sur la très grande majorité du film : chez l’agent K qui en vient à remettre sa condition de Replicant programmé en question, chez Wallace plus motivé encore à poursuivre sa production d'ange esclave (si on peut dire ainsi) ou encore le lieutenant Joshi qui tient à préserver le peu d’ordre existant entre humains et Replicants.


Et le second est la solitude qui gagne davantage cette société futuriste. Que ce soit celle de Deckard, abandonné dans ce grand hôtel luxueux à Las Vegas (déjà présent dans la bande-annonce), du Replicant Sapeer (joué par un Dave Bautista injustement trop peu présent) ou surtout de l’agent K dont l’évolution vers une humanité qui passe tant par l’enquête qui le mènera inévitablement à Deckard que par une relation factice et superficiel entretenu avec Joi, un hologramme donnant la sensation artificielle d’évoluer comme un être humain, mais restant toutefois à la place de machine dont on peine à juger si elle est vraiment dotée d’une conscience une non.


Bien sur le traitement d’un thème ou d’un sujet passent par l’atmosphère et le ton du film, et connaissant Denis Villeneuve on pouvait déjà se douter qu’on se retrouverait dans quelque chose de poisseux et d’étouffant, on ne s’y est pas trompé. Cette atmosphère fonctionne avec le travail habituel sur le design sonore et l’atmosphère musical de Benjamin Wallfisch et Hans Zimmer pour un rendu finalement passable musicalement (plus que la partition de Dunkerque bien trop répétitive et tapageuse) si on exclut certaines hausses sonore un peu énervante. L’ambiance sonore étant, comme toujours chez Villeneuve, accouplée avec ses grands plans larges posés et se mouvant lentement sur toute un territoire comme le plan large sur les terres agricoles industrialisés de Californie ou dans un Los Angeles toujours en grande perdition. Villeneuve reste fidèle à la condition défaitiste des êtres humains dans le premier film à travers l’imagerie mais ne cherche pas pour autant à surfer sur le talent d’esthète du vieux Ridley Scott.


Sans parler aussi du travail sur certains plans astucieusement trompe l’œil comme la descente de l’agent K et de Luv dans le centre de l'usine Wallace Corporation avec la présence de cette colorimétrie jaunâtre (propre au cinéaste québécois) se reflétant en vague successive sur les murs, ou des étincelles d’un feu de camp formant une transition très gracieuse d’un lieu à un autre l’espace d’une nuit.


Le tout renforcé par le travail de Roger Deakins en tant que chef opérateur rendant chaque image et chaque plan plus beau avec ce qu’il doit faire traverser aux yeux du spectateur : l’anxiogène dans un hôtel dégagé par l’absence de musique (sauf le retentissement d’un note de piano rendant l’hôtel que plus anxiogène) et cette photo orange crépuscule dans un paysage brumeux, et alternant tel un jongleur entre différent filtre pour rendre l’image toujours plus belle à contempler, l’aspect contemplatif étant déjà l’un des constitutifs de l’esprit du premier film et donnant des visuels neufs très varié.


Sauf que, Blade Runner 2049 aurait pu être un quasi sans faute si elle se contentait justement de la communication par l’image ainsi que son esthétique en évitant d’être parfois trop verbeux au niveau des dialogues, notamment lors des révélations importantes. La sensation de lyrisme et la beauté qui veut ressortir du visuel et de son fond s’en retrouvent parfois atténué voire même assez diminué, y compris dans ses dernières minutes ou lors d’une révélation qui avait pourtant été parfaitement démontré par ce que l’on voit à l’écran.


Alors que cette beauté n’est pas ce qui manque,


comme la scène de la première relation charnelle de K avec Joi se mélangeant avec le corps d’une femme Replicant se passant de peu de mot, et constituant une étape de K vers l’humanisation. A la fois beau et étrange connaissant la nature de Joi !


Ou même une simple scène d’atmosphère comme l’entrée de K dans un Las Vegas abandonné et contaminé par les radiations, c’est du neuf et un très bon exemple de l’ambiance très anxiogène reconnaissable aux films de Villeneuve.


Aux premiers jour de sorti du film, c’est trop tôt pour dire comment cette suite tardive sera reçu par la majorité du public. Elle aura ses haineux comme ses défenseurs. Je me situe dans le second camp : selon moi cette suite fait ce qu’elle a de mieux à faire, perpétuer les thématiques du premier film en les poussant plus loin, en parvenant à trouver un bon équilibre entre un renouveau dans le visuel et l’écriture sans pour autant tomber dans l’ombre de son aîné et en laissant le soin à son cinéaste de s’exprimer d’une certaine façon. C’est ce que j’ai ressenti à ma sortie, et au vu de tous les projets pour lesquels Villeneuve est approché, je ne me fais pas trop de souci quant à l’évolution de sa carrière.

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