Le titre du dernier Mel Gibson est un peu trompeur. Ne vous attendez pas à un bain de sang, loin de là. Oui, il y a un bon gunfight final, un sicario qui traîne dans les parages et Mad Mel qui joue du fusil, certes. Mais les enjeux de cette très honnête série B qu'est Blood Father sont définitivement ailleurs.


Certains y verront certainement un digest des rôles les plus évidents qui ont jalonnés la carrière de Mel Gibson. Cependant, a plusieurs reprises, le film semble bien plus prendre son essence dans sa vie. Quelques dialogues sonnent comme des confessions de l'acteur, un affranchissement de son passé tumultueux, tandis que certaines situations symbolisent sans doute sa mise à l'écart professionnelle ou sa probable impression d'être comme un paria. Blood Father y gagne immédiatement en chair comme en incarnation. Car derrière son personnage de John Link, Mel Gibson lui-même n'est jamais très loin. Ainsi que l'icône. Buriné, la barbe hirsute et blanchie, l'acteur a vieilli mais sa force est toujours là, intacte. Ainsi que son regard perçant. Blood Father est tout entier construit sur et tourné vers son personnage d'outcast, aussi Link que Gibson, cabossé, un peu usé, mais sa présence, son aura, reste définitivement la même.


Il porte littéralement le film sur ses épaules, Mel. Classique, sans aucune surprise, Blood Father semble comme vissé sur des rails que le genre a souvent emprunté. Dès lors, Jean-François Richet privilégie une relation père / fille qui fait le second intérêt de l'oeuvre, tout comme la seconde évocation du passé du personnage. On devine à ce titre la séparation longue et douloureuse et la volonté de Link à retrouver son enfant farouche. Et quand celle-ci refait surface et débarque dans vie, le père saisit l'occasion de renouer les liens par trop distendus par les années de prison et la disparition.


La fuite en avant du duo, écrasée par les décors arides du Sud des Etats-Unis, permet de s'apprivoiser et de (re)faire connaissance. Le vieux bourru s'attendrit. La paumée fragile se redécouvre. Ces deux là s'aiment, c'est évident, malgré la distance initiale et l'addiction qui les oppose. Le film joue constamment de cette dynamique plusieurs fois touchante entre un papa hyper protecteur et sa fille qu'il n'a pas vu grandir dont l'âge fait qu'elle lui échappe. La ravissante et gracieuse Erin Moriarty se distingue, tient parfois tête à Mel, ou se love en confiance dans ses bras. Cette relation fait parfois penser à Maggie, où Arnold Schwarzenegger éprouvait, dans un rôle similaire, le même amour pour sa fille, alors que l'inéluctable s'abattait sur elle.


Ici, Jean-François Richet habille cette relation, qui fait tout le prix du film, des atours d'un road movie au léger accent d'action d'une série B solide et sans prétention. Mais Blood Father compte bien plus sur son intimité familiale, dont le réalisateur français capte à merveille l'essence, pour séduire et emporter. Inespéré, sensible, le retour aux affaires est de qualité, sans prétention et émouvant.


Welcome home, Mel.


Behind_the_Mask, qui a décidé de ne plus se raser.

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le 17 sept. 2016

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