« Borg/McEnroe » s’impose comme un film élégant et rigoureux, qui restitue avec une précision remarquable l’univers du tennis de haut niveau au tournant des années 1980. La reconstitution est soignée, l’esthétique fidèle à l’époque, et Janus Metz parvient à insuffler une tension feutrée qui accompagne chaque geste, chaque échange, chaque montée d’adrénaline. Le soin apporté à l’ambiance, aux attitudes, à la pression environnante installe un climat crédible et immersif.
Le film peut surtout compter sur deux interprétations fortes : Sverrir Gudnason, impressionnant de maîtrise dans la peau d’un Borg glacé, méthodique, obsédé par la perfection, et Shia LaBeouf, qui trouve dans le personnage de McEnroe un terrain idéal pour exprimer fougue, fragilité et nervosité. LaBeouf semble presque fait pour ce rôle, qu’il habite sans jamais tomber dans la caricature. Ensemble, les deux acteurs offrent un contraste fascinant et alimentent une dynamique psychologique qu’explore le film avec justesse.
Pourtant, malgré cette solidité artistique, « Borg/McEnroe » souffre d’un déséquilibre et d’un manque d’ampleur émotionnelle. L’écriture s’attarde davantage sur Borg, laissant McEnroe parfois en retrait, ce qui affaiblit légèrement la dimension duel que l’on pouvait attendre. De même, la reconstitution de la finale de Wimbledon 1980, pourtant l’un des affrontements les plus mythiques de l’histoire du tennis, reste étonnamment sage : filmée de très près, rythmée sans grande audace, elle peine à retrouver l’intensité réelle du match.
Le film, très intérieur, préfère disséquer les failles et le passé des deux champions plutôt que de jouer pleinement la carte du spectaculaire. Ce choix, cohérent et assumé, apporte une certaine profondeur, mais prive aussi le récit de souffle émotionnel. On admire beaucoup, mais on est moins souvent saisi. Même en connaissant déjà l’issue de la finale, on aurait pu espérer une montée en tension plus palpable, une vibration plus forte.
« Borg/McEnroe » est un biopic solide, finement interprété et riche d’atmosphère, mais qui demeure un peu trop retenu pour véritablement bouleverser. Une œuvre élégante, respectueuse, intéressante, mais à laquelle il manque ce « coffre » qui aurait pu en faire un film de sport réellement mémorable.