Yann Gozlan est de ces cinéastes français qui aimeraient bien faire leur trou dans le film de genre mais qui se retrouve dans une industrie où de tels films sont difficiles à produire. C'est d'autant plus dommage car il fait clairement partie de ceux qui ont le plus d'arguments en la matière, avec ses deux premiers films perfectibles mais assez innovants dans leurs genres, il a prouvé ne pas avoir froid aux yeux. Fasciné par les personnages sur le point d'imploser, mis sous pression et qui doivent se pousser à l'extrême pour se sortir de situations qui sortent de leurs ordinaires. Et plus que jamais avec son troisième film, il cristallise complètement cette idée et l'annonce même dans son titre, promettant un film aussi percutant que nerveux.


Burn Out est donc presque intégralement tourné vers la montée en pression de son héros jusqu'à son déraillement. Tout est en accord avec les obsessions premières de Gozlan même si le film ne va jamais vraiment plus loin que ça. Gozlan traîne les mêmes casseroles avec ses personnages stéréotypés et au final très peu développés qui alimentent juste l'efficacité du récit. Car ici, l'essentiel c'est les scènes de courses-poursuites et jamais les scénaristes n'essayent vraiment de développer ce qui se passe entre. La vie familiale du héros n'est qu'un prétexte, les gangsters sont caricaturaux et le quotidien de son protagoniste est maladroitement géré. Le personnage ayant plusieurs possibilités d’alléger la pression si il n'était pas aussi bête. Mais comme lui, le scénario va à 200 à l'heure et ne s'encombre pas à essayer de réparer les incohérences. C'est finalement la grosse faiblesse de ce Burn Out, son écriture pas très fine et surtout très peu soignée.


Mais ce défaut est surtout compensé par deux gros atouts, sa mise en scène et son acteur principal. François Civil impressionne dans ce rôle à contre-emploi et domine un casting qui finit souvent dans le sous-jeu (Manon Azem) ou le caricatural (Olivier Rabourdin et Samuel Jouy mais qui profitent de vrais gueules de cinéma). L'acteur principal est habité par son personnage et se donne à fond pour créer de l'empathie et lui donner de l'épaisseur à travers une performance nuancée et à fleur de peau. Mais là où le film impressionne aussi c'est dans son impeccable réalisation. Yann Gozlan cherche à tout prix à ne faire qu'un avec son héros et reste toujours au plus près de lui. Chaque passages est magnifiés par une photographie léchée, un montage acéré et une musique minimaliste percutante qui électrise les moments les plus intenses. Car passé les influences évidentes, on pense à Drive mais aussi à The Place Beyond the Pines avec ce héros qui tombe dans la délinquance pour sa famille mais surtout les deux films ont des scènes d'ouvertures similaires, on se retrouve face à un long métrage qui sait proposer de formidables idées. Avec ces cascades minimalistes, brutes, et filmées au plus près pour en décupler l'effet de vertige et la viscéralité, Burn Out fait un sans faute.dans l'exécution de son action et impressionne car jamais il ne laisse paraître un manque de moyen ou de savoir-faire. C'est découpé avec précision et admirablement bien cadré dans des courses-poursuites qui monte crescendo en intensité.


Burn Out va refréner les passions en raison de son scénario aux fraises mais c'est une oeuvre qui fonctionne avant tout comme une expérience sensorielle. C'est par la grâce de sa mise en scène et la force de son immersion que le film fonctionne à plein régime. Et dans une industrie française assez frileuse en terme de shoot d'adrénaline, celui-ci dépote. Sans jamais singer les productions américaines, il développe sa propre identité et reste raccord au cinéma de Gozlan tout en parvenant à s'imposer comme un film d'action noble dans son exécution. C'est caricatural au niveau de ses personnages mais n'essaye jamais d'en faire trop surtout qu'il peut compter sur un François Civil impeccable pour créer l'empathie et maintenir le spectateur accroché à son siège. Malgré ses défauts, Burn Out est assurément une réussite et prouve définitivement que Yann Gozlan en a dans le ventre et qu'il y a clairement quelque chose à exploiter au sein du film de genre français.

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le 6 janv. 2018

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