La Culture pour survivre. Un film indispensable !

La sortie prochaine de Un triomphe, le nouveau film d'Emmanuel Courcol avec Kad Merad en théâtreux intervenant en milieu carcéral, m'a donné envie d'écrire une critique sur César doit mourir, l'un des films de mon Top 10, et sans doute celui que je recommande le plus (en même temps c'est sûrement le moins mainstream du Top !).


Ici, pas de Samuel Beckett, mais du Shakespeare. Si dans Un triomphe, En attendant Godot résonne tout particulièrement pour les détenus condamnés à attendre et s'emmerder, inactifs vis-à-vis de la société, Jules César rencontre ici le même écho, créant un drôle de parallèle entre la mort de l'Empereur et les épisodes de vie qui ont mené ces hommes au trou.


L'une des grandes forces de Cesare deve morire, pour reprendre le titre original, est sa capacité à naviguer à la limite entre documentaire et fiction. Cette limite se bouillant progressivement, l'un et l'autre se mêlant pour former un petit bijou parfois un peu difficile à appréhender (hé oui, on ne peut pas ranger le film dans une case), mais tellement unique.


Les frères Taviani, Paulo en Vittorio, n'en sont pas à leur coup d'essai puisqu'il s'agit de leur 16e long métrage, et comptent une Palme d'Or, Padre Padrone en 1977, à leur actif.
Sorti en 2012 et récompensé quant à lui de l'Ours d'Or à la Berlinale, et de 5 Donatello (l'équivalent italien des César en France) dont meilleur film et meilleurs réalisateurs, César doit mourir est, en toute objectivité, un pur chef d'œuvre.


Les "acteurs" sont ici de vrais détenus, parmi les plus sensibles, enfermés dans une prison de haute sécurité à Rome. Condamnés à perpétuité ou à de lourdes peines, beaucoup sont issus de la mafia et certains s'expriment même dans leur patoi natal.
Les frères Taviani ont suivi le montage de la pièce Jules César, du choix des acteurs et des premières répétitions, jusqu'à la première représentation. Un parcours du combattant, semé de doutes, de tensions, mais aussi d'amitiés et d'émulation entre co-détenus.


Une fois n'est pas coutume, le film s'ouvre par la fin de l'histoire, celle de la représentation et des applaudissements nourris du public. Alors que celui-ci rentre dans son douillet chez-soi, les détenus sont eux rapatriés dans l'enfer de leur cellule.
Aux couleurs succède un somptueux noir et blanc qui nous ramène six mois en arrière, au début de l'aventure.


Du haut de ses 1h15, César doit mourir est un film majeur dans la formation de ma cinéphile, un coup de massue où théâtre et cinéma se mêlent pour ne former plus qu'un.
Je considère la fin du film, ce terrible plan séquence sur un détenu qui se sert un café dans sa cellule à l'issue de la représentation, et se tourne après un long moment vers la caméra pour déclarer que maintenant qu'il a découvert le théâtre et les mots de Shakespeare, sa cellule est devenu un véritable enfer, comme l'une des plus belles et des plus bouleversantes du cinéma.
A découvrir sans tarder !

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le 24 août 2021

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D. Styx

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