Profitant de la très longue postproduction de son "Tintin", Steven Spielberg en profite pour adapter un bouquin pour enfants, tout en revenant à un cinéma à l'ancienne, avec grands sentiments, gros moyens, photo lêchée et tout le toutim. Il est préférable, donc, de laisser tout cynisme au vestiaire avant la projection du film. Projection qui s'avère d'ailleurs assez douloureuse le temps des trois premiers quarts d'heure, Spielberg plongeant tête baissée dans la guimauve et l'artificiel, filmant des paysages de carte postale et de grands comédiens réduits à incarner des caricatures vivantes. Heureusement, à l'instant où la guerre éclate, le récit s'emballe et devient enfin intéressant, délaissant un jeune héros bien terne pour suivre les mésaventures de sa star chevaline. Alors bien sûr, on tiquera sur beaucoup de choses, sur la vraisemblance, sur les protagonistes peu mémorables parlant tous anglais malgré leurs différentes nationalités, sur le léger manque de souffle et d'émotion de l'ensemble... Car ce qui empêche vraiment "Cheval de guerre" d'atteindre le stade d'un grand film c'est son orientation, l'obligation qu'a Spielberg de livrer un film tous publics, visible par tout le monde et qui ne froissera personne. Saluons d'ailleurs le sens incroyable de l'ellipse du cinéaste qui parvient à ne rien cacher des atrocités de la guerre tout en ne les montrant jamais vraiment (l'exécution près du moulin, grandiose). La mise en scène de Spielberg est donc la grande qualité du film (avec la superbe photographie de Janusz Kaminski), ample et aérienne, offrant de véritables morceaux de bravoure (l'épisode dans les tranchées est remarquable), bien aidée par le travail exceptionnel effectué sur les chevaux. Une oeuvre mineure donc dans la carrière d'un immense cinéaste, à ranger aux côtés d'"Always" et du "Terminal", péloches inoffensives mais tout de même sympathiques.