"Chiens perdus sans collier" est une jolie formule pour désigner des enfants, des adolescents issus de milieux sociaux défavorisés, voir sordides, et promis à la délinquance. A moins que la société et la justice ne veillent à protéger ces "sauvageons". Le juge pour enfants Lamy est de ceux, trop rares, qui s'attachent à sauver des enfants laissés pour compte.
Le film de Jean Delannoy avait doublement de quoi énerver le jeune critique François Truffaut. Delannoy incarne ce "cinéma de papa", cette qualité française qui fait la part belle aux acteurs et aux dialogues, à l'adaptation "équivalente" d'oeuvres littéraires (de Gilbert Cesbron ici) au détriment de l'authenticité et de la personnalité. En outre, la question de l'enfance blessée -si sensible chez Truffaut, l'homme et le cinéaste- passe ici par des lieux communs et des raccourcis, parfois démagogiques (la faute aux adultes, sans plus approfondir l'aspect social dans son ensemble), et toujours dépourvus de sincérité, d'une vraie compassion desquelles pourrait émaner un point de vue juste et original.
De fait, Gabin et deux des jeunes gens que le juge suit plus particulièrement sont toujours dans le surjeu. Le postulat de l'un, le dénuement des autres ne provoquent, malgré la nature du sujet, que de l'indifférence.