Cleopatra
6.6
Cleopatra

Long-métrage d'animation de Osamu Tezuka et Eiichi Yamamoto (1970)

Cleopatra est un anime incroyable. Il arrive à combiner romantisme, érotisme, humour, et drame, le tout avec une animation très expérimentale, une réalisation qui s'essaye à tous les délires possibles et imaginables, une musique sublime, l'ensemble donnant lieu plus à une œuvre d'art qu'à un simple long-métrage d'animation tant son esthétisme est poussé et soigné. Là, je viens de vous résumer tout le film.
Mais je préfère vous détailler l'ensemble, et vous expliquez en quoi Cleopatra est génial et mérite que chacun y jette un coup d'œil.
Bon, je le précise pour la forme : le scénario s'éloigne légèrement de la véracité historique. Les auteurs n'en ont strictement rien à faire, et ne se privent pas de multiplier les anachronismes les plus fous, sans doute juste dans une volonté de pousser le délire à son paroxysme. Mais ne vous y trompez pas : ce film possède effectivement un scénario, et c'est bien lui (entre autre) qui tient le spectateur en haleine tout au long de ses 112 minutes. C'est peut-être pour cela que je l'ai préféré à Kanashimi no Belladonna, qui s'il va plus loin dans la surenchère visuelle peine parfois à maintenir l'attention de celui qui le regarde.
Ce film ne se limite pas au sexe. Il y en a, beaucoup, mais il ne s'agit que d'érotisme et jamais de pornographie, chaque scène d'enlacement se trouvant gratifiée d'une esthétique encore plus poussée, ce qui rendrait ces moments presque irréels. Le sexe lui-même n'est jamais gratuit : notre héroïne s'en sert avant tout comme d'une arme pour attirer ses proies et maintenir sa souveraineté dans son royaume, et ainsi pense-t-elle sa sécurité. Même si parfois, l'amour s'en mêle véritablement.
Si vous voulez du H, vous serez déçu : la plupart des personnages féminins ont beau se balader les seins à l'air, vous ne verrez rien au moment de l'acte. Mais soyez tout de même reconnaissants, puisque les Animerama ont ouvert la voie à l'acceptation des animes pour adultes, donc aux animes hentai.
Comme indiqué plus haut, ce film possède de nombreux aspects, et voit plus loin que son érotisme. Tezuka oblige, nous retrouvons dans Cleopatra un léger côté cartoon, et ainsi beaucoup d'humour, même parfois pendant les scènes de sexe. Cela n'a rien d'incompatible.
Le drame non plus n'est pas incompatible avec cet anime, puisque nous y suivons le calvaire d'une reine brisée, qui offre sa vertu contre la liberté de son peuple, prête aux sacrifices, aux rôles les plus ingrats, et au déshonneur. Cela nous emmène vers des scènes tragiques, magnifiées par quelques musiques exceptionnelles et parfaitement placées aux différents moments du film. Et là, cela devient tout simplement beau.
Reste à parler de l'animation, que j'ai qualifié tantôt d'expérimentale. Eiichi Yamamoto et Osamu Tezuka ont mené d'étranges expériences sur ce film ; ils se sont sans doute fait plaisir, et le résultat a de quoi surprendre.
La séquence d'introduction est formée d'un mélange de prises de vues réelles et d'animation ; les personnages apparaissent alors comme de véritables acteurs, par dessus lesquels ont été redessinés visages et contours. Il faut quelques secondes pour comprendre comment ils ont pu obtenir un résultat aussi visuellement étrange.
La suite revient à une animation plus classique, mais non moins ébouriffante. Choix de couleurs détonnant, stylisation à l'extrême de certaines séquences : quand les réalisateurs décident de se lâcher sur un passage, ils y vont à fond. Le retour de César à Rome prend ainsi la forme d'un hommage appuyé à Degas, à Delacroix, ou encore à Picasso. Nous retrouvons ce même César un peu plus tard dans une représentation de théâtre kabuki. Pourtant, cela ne donne jamais l'impression de se transformer en n'importe quoi, ou en simple délire pour le délire, car d'un point de vue purement visuel, le résultat est toujours réussi, et bien entendu toujours stupéfiant. Littéralement. Nous obtenons ici la preuve que chez Mushi Production, le LSD était de rigueur.
Cleopatra est le meilleur anime que j'ai eu l'occasion de voir depuis le début de l'année. Ni plus, ni moins.
Son style ne saurait être résumé avec des mots tant il explose tous les standards connus à notre époque. C'est somptueux, c'est hallucinant, c'est génial.
Ninesisters

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8

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