Coco
7.7
Coco

Long-métrage d'animation de Lee Unkrich et Adrian Molina (2017)

Quelle sont, exactement, les limites de Pixar ? Exception faite de rares ombres au tableau (l’exercice de la suite n’étant, de fait, guère aisé), le parcours du légendaire studio convie émerveillement et respect dans un même regard… n’ayons pas peur des mots : car de la révélation Toy Story au tout-récent Onward, la petite lampe n’aura eu de cesse d’assoir sa position de leader incontesté de l’animation occidentale, transcendant des matériaux de prime abord enfantins pour illuminer l’imaginaire des petits comme des grands.


À l’heure où nombre de productions continuent de nous prendre pour des poires, Pixar fait donc office de paradoxe ambulant, et ce d’autant plus que l’ombre de l’impérieux Disney en compose largement le paysage. Modèles d’ingéniosité et d’innovation constante, ses fins esprits accouchèrent ainsi (entre autres choses) du superbe Coco, invitation lumineuse comme remuante au cœur d’une identité mexicaine riche de potentiel : et si les ingrédients ont beau être connus, comptez sur Pixar pour vous surprendre quoi qu’il advienne.


Ce qui résumerait très bien, in fine, l’expérience Coco, elle qui ne manquera pas de vous remuer en dépit d’une prévisibilité chronique patente. Qualifier l’effet de prouesse ne serait ainsi pas exagéré, le parcours de Miguel collectionnant les limites d’ordre narratif sans jamais se parjurer, bien au contraire : les grands jalons tiennent de l’évidence, mais la manière et la justesse pixarienne (si caractéristique) les liant font, de fil en aiguille, du long-métrage une indiscutable réussite. Il serait alors commode, pour débuter, de citer sa plastique à nulle autre pareille, des légions de couleurs vives se fondant en une toile dépaysante à souhait : aussi, le monde des morts n’aura jamais été aussi vivant, l’enchantement fourmillant de mille et un détails.


Il y a aussi, en filigrane, cet hommage et respect palpable que Coco voue à la culture mexicaine, loin des habituels procédés où poncifs et prétextes sont les maîtres-mots : conjointement à sa palette visuelle remarquable, le film du tandem Unkrich & Molina capte avec brio l’essence que revêt la Fête des Morts, l’élevant par-delà le simple prisme de « l’ordinaire » au moyen d’une intrigue plutôt maligne. Ajoutez-y cette passion contagieuse pour la musique, le récit baignant dans d’ensorcelantes partitions, et voici donc que la trame familiale se mue en une ode polymorphe : quête et apprentissage, l’émancipation par la réunion et vice-versa, l’amour et la haine… la vie et la mort. Les deux faces de l’indescriptible pièce qu’est l’existence.


Ainsi, quand bien même Ernesto de la Cruz endosserait le rôle d’antagoniste sans foi ni loi, faisant ainsi glisser Coco dans un rapport de force plus classique, le cheminement l’y conduisant lui aura permis de prétendre à bien davantage (qui plus est, ses motivations ne sont pas gratuites) : qu’il s’agisse de ses ramifications filiales ou de son aventure teintée de spiritisme, la cohérence du tout est finalement à même d’outrepasser l’empreinte téléphonée de ses quelques ressorts et rebondissements. Porté par sa brochette de personnages hauts en couleurs, dont Miguel incarne un fer de lance ô combien attachant (et Dante le sidekick ridiculement amusant), le film est un voyage sans fausse note.


Entre atmosphère captivante et rythmique fluide à l’envie, la conclusion de « l’initiation » du rejeton Rivera prend ainsi des proportions dantesques où, surprise, les larmes nous guettent : paroxysme de la tristesse heureuse, ce Remember Me dévastateur parachève ainsi ce coup de maître tenant du chef d’œuvre. Preuve en est de sa capacité à, d’ailleurs, tisser un propos universel dans un creuset résolument typique : le talent continue donc de se cultiver chez Pixar, et il a de beaux jours devant lui.

NiERONiMO
9
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le 5 mai 2020

Critique lue 153 fois

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NiERONiMO

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