Run, man, run.
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le 29 août 2013
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Le Western Spaghetti, dont Sergio Leone est le maître incontesté, est un genre capable du meilleur comme du pire. Cherchant à tout prix à surfer sur la vague Leone, un tsunami de films moyens, voire médiocres, a déferlé. Cependant, certains réalisateurs, épaulés par des scénaristes de talent, ont réussi à s'approcher de la qualité des œuvres de Leone, tout en conservant une touche "originale" et personnelle. Pour moi, ces réalisateurs sont Sergio Sollima et Sergio Corbucci. Il semblerait qu'il faille s'appeler Sergio pour être un grand réalisateur de western italien ! J'avoue humblement que Colorado fut mon premier film de Sollima… Il faut un début à tout, n'est-ce pas ? Tout ça pour dire que Colorado est un grand western, très proche des films de Leone, et bien loin de la plupart des westerns spaghetti (malgré tout très appréciables pour la plupart) parfois maladroits, trop faciles, voire même vaudevillesques.
Pour son film, Sollima s'est entouré des meilleurs. Au scénario, on retrouve le très prisé Sergio Donati (qu'est-ce que je disais ?!), un ami de Sergio Leone qui l'a aidé à plusieurs reprises, notamment sur Il était une fois dans l'Ouest et Le Bon, la Brute et le Truand. Et bien sûr, le maestro Ennio Morricone à la bande originale. Petite anecdote : le thème du duel final est utilisé dans Inglourious Basterds. Autre anecdote, et celle-ci est véridique : le titre original du film est un titre d'Ennio Morricone utilisé dans Et pour quelques dollars de plus, raison pour laquelle Leone aurait dénoncé le film.
Commençons par la réalisation de Sollima. Comment la décrire ? C'est très habile, intelligent et magnifiquement mené. Soyons honnêtes, c'est tout simplement un coup de génie. Il suffit de voir les premières minutes du film pour se rendre compte du talent de Sollima, et surtout une scène qui, à mes yeux, est la plus marquante du film : la fuite de Cuchillo escaladant dans le désert. C'est indicible ! Il faut le voir pour le croire. Dans Colorado, Sollima, par son talent, réussit vraiment à ravir les adeptes du western. En tout cas, j'ai été comblé (même si je ne prétends pas être un expert du genre).
Concernant le casting, il contribue en partie à la réussite du film, mais pour ma part, c'est loin d'être le point le plus déterminant. Pourtant, côté casting, rien à redire, il est parfait : les acteurs ont de la gueule, les actrices... mamma mia ! Et puis Lee Van Cleef en vedette dans l'un de ses meilleurs rôles. Mais une mention spéciale revient à Tomás Milián dans son rôle de Cuchillo, le représentant du peuple.
Le scénario est en réalité bien plus complexe, mêlant enjeux politiques, critique du système judiciaire, intérêts financiers, place de la femme, critique des privilèges entre riches et pauvres, et j'en passe. C'est un film très riche intellectuellement, et c'est précisément pourquoi j'aime le western : c'est un genre si complet et profond. (Je ne me lance pas dans ce débat, sinon ça risquerait de prendre trop de lignes et de devenir hors sujet). Vu ce qui est traité, on s'attend donc à des personnages intéressants et complexes, et c'est le cas. Cependant, la plupart ne sont pas suffisamment présents. La raison est simple : dès que Corbett (Lee Van Cleef) se lance à la poursuite de Cuchillo, nos amis traversent des lieux très différents, et donc rencontrent des personnages tout aussi variés. On visite le Texas, en passant par une ville, un ranch, le désert, puis on se retrouve au Mexique avec ses curiosités locales.
Ce jeu du chat et de la souris est très habilement scénarisé et mis en scène. Le point le plus percutant réside dans les répliques et les scènes entre nos deux protagonistes, tantôt par les ruses de Cuchillo, tantôt par la classe qu'impose notre chasseur de primes incorruptible (dans tous les sens du terme). La touche d'humour dans le tableau sombre et poisseux qu'impose le film vient de Cuchillo et des scènes où Corbett en prend pour son grade. C'est d'ailleurs très judicieux d'avoir dépeint Corbett au début du film comme un homme intouchable, pour le voir peu à peu perdre de sa grandeur légendaire suite à sa rencontre avec Cuchillo. Alors certes, on devine très vite comment l'histoire va finir, mais ce n'est pas vraiment un problème compte tenu de l'ingéniosité de Sollima dans sa réalisation.
En ce qui concerne la musique, elle est relativement discrète, du moins dans la majeure partie du film. Mais elle n'en reste pas moins de très bonne facture. C'est vraiment dans les 15 dernières minutes du film qu'elle impose sa présence, il faut dire que le chapitre final de l'œuvre tient en haleine et en respect. Musicalement, c'est encore un chef-d'œuvre de Morricone, "et puis c'est tout".
Colorado est un excellent film, et un bon moyen pour les néophytes de découvrir un autre western que ceux de Leone. Les grands thèmes et codes du genre sont utilisés dans cette œuvre de Sollima : c'est crasseux, classe par le charisme fou des personnages, parfois violent, parfois drôle, sans jamais tomber dans le parodique ou le prétentieux. Ce film est ambitieux en termes de réalisation, mais le pari est gagné, car Sollima n'est pas tombé dans le piège de la facilité.
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Créée
le 5 juil. 2013
Modifiée
le 5 juil. 2013
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