Ma première rencontre, toute récente, avec Sam Peckinpah, datait d’Apportez-moi la tête d’Alfredo Garcia, western moderne âpre et violent, qui m’avait emporté avec lui, malgré le manque d’identification à son protagoniste principal. Désireux d’en voir plus, j’avais emporté dans mes valises de vacances de Noël, deux longs-métrages du bon Sam, Osterman Week-End, et donc Croix de Fer, par lequel j’ai commencé.


Et ce film, malgré les tartes qu’il m’assénait à la figure, n’a pas cessé de me captiver. J’y ai retrouvé l’âpreté d’Alfredo Garcia, transportée dans la Crimée en guerre, lors de la retraite des Nazis. Rien n’est pur, rien n’est beau. Tout n’est que sang, barbelé, boue, barbe mal dégrossie (avec un même amour des gueules que chez Leone) et béton déchiré. Et à l’intérieur, l’âme des personnages, tantôt égotique et manipulatrice, tantôt corrompue par la folie, mais toujours désespérée, n'est pas bien plus belle.


Derrière les mots, un discours magnifiquement pacifiste, sur l'absurdité de la notion de guerre et de patrie nous est enseigné par le nazi James Coburn, vibrant de charisme, qui dans ses actes, tente de maintenir face à l'ordre et au chaos ses principes d'amitié, et dans une certaine mesure de respect et de bonté, ceux-la même que la guerre aurait dû faire disparaître.


Croix de Bois m'a montré un des antagonistes les plus réussi du cinéma. Ambitieux mais lâche, riche et pétri d'égo, prêt à massacrer pour un insigne insignifiant pour tous sauf pour lui. Mais comme tous les grands méchants, il est réussi car il nous serait plus facile d'être lui que Steiner (James Coburn).


Et le film, par sa fin (no spoil), son rire, son chant d'enfant et sa citation finale de Brecht ("Ne vous réjouissez pas de la défaite du monstre car, à travers le monde qui l'ins­talla puis le stoppa, la putain qui l'a engendré est de nouveau en chaleur"), Peckinpah nous prévient que l'on pourrait tous être la victime de cette macabre ironie.

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le 23 déc. 2020

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Agregturp

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