Rock'n freaks.
Pape d'un certain cinéma trash et underground, maître incontesté d'un pur mauvais goût assumé, John Waters met de l'eau dans son vin dans ce film un peu plus commercial, produit par un gros studio...
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le 14 janv. 2013
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Pour quelqu'un comme moi qui n'a absolument pas aimé Grease, il faut reconnaître que le début de Cry-Baby est jouissif. John Waters, en bon cheval de Troie d'Hollywood, fait un gros doigt d'honneur à la débilité de ce type de comédie musicale populaire, en en exagérant les traits à l'extrême.
Les années 50 sont totalement caricaturées, le film dégouline de ringardise, les personnages sont tous plus stupides les uns que les autres, et les acteurs surjouent jusqu'à n'en plus pouvoir. Et pourtant, ce dixième degré fonctionne étonnamment bien, et arrive à ne pas tomber dans la lourdeur cradingue d'un Pink Flamingo. Le film déconstruit totalement le récit de Grease, non sans en critiquer le conformisme, et la B.O, dans le pur style rock'n'roll à la Elvis, est une agréable réussite qui doit beaucoup à la voix de Depp et Locane.
Car ce que vise Waters avec le film, c'est l'Amérique bien-pensante. Les petits bourgeois, en somme, et leurs valeurs conservatrices, qui se font sévèrement critiquer pendant l'entièreté du long-métrage : leur vision caricaturale de la jeunesse, leur naïveté maladive et l'éducation désastreuse qu'ils donnent à leurs enfants. Sous couvert d'humour, on voit que Waters penche largement du côté des freaks, des rednecks et autres marginaux, qui sont traités avec sympathie et auto-dérision.
Dualité assez classique de la part du cinéaste, qui rappelle le traitement que Burton fera aussi des freaks, mais qui possède une sincérité qui lui donne tout son intérêt. Mais Waters ne se limite pas à ça et dissémine (parfois discrètement, comme avec le camion remplie d'afro-américains qu'on voit une seconde à l'image) des piques envers les différents dérèglements de l'Amérique (discrimination raciale, justice défaillante, politique du bourrage de crâne etc...).
Reste quelques bémols. Déjà, une mise en scène bien trop sage pour un film censé secouer l'Amérique conservatrice : à part quelques idées originales lors de certaines séquences musicales, et le côté délirant de certaines chorégraphies, rien qui ne renverse vraiment le cahier des charges d'une comédie musicale. Ensuite, le film tombe dans le piège de nous servir un récit balisé et prévisible dans sa dernière partie, comme s'il n'assumait pas jusqu'au bout sa démarche de déconstruction au dixième degré. Dommage, le doigt d'honneur de Waters semble se rétracter sous la pression des producteurs.
On a donc un film assez jouissif, un peu bancal parfois (notamment dans l'humour de sa dernière partie, où on retrouve une certaine lourdeur) mais qui vaut le coup d’œil, ne serait-ce que pour la déclaration d'amour à l'Amérique des freaks si chère à John Waters.
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Créée
le 12 sept. 2017
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