David Lynch : The Art Life par Ragnar Lyndon

Pour un fan hardcore de Lynch comme moi -le Lynch réalisateur évidemment-, avide d'en savoir plus sur mon chouchou fétiche, ce documentaire est assez... déroutant, pour ne pas dire décevant. Attention : pour un spectateur averti et renseigné sur le contenu du docu, peut-être que c'est du génie, mais on va dire que je ne m'attendais pas à si peu sur mon David. J'y suis sans doute allé trop plein d'illusions (j'étais à deux doigts de penser qu'il allait révéler le sens caché de Mulholland Drive).

Tout d'abord, le documentaire présente Lynch comme une oeuvre d'art lui-même, par des plans très contemplatifs, et qui se veulent très esthétiques, mais peut-être trop, pour un documentaire. C'est une approche néanmoins intéressante, surtout qu'on découvre au fur et à mesure du film qu'il est complètement fou, Lynch (qui en doutait ?). Mais cette approche trop esthétisante est en fait une façade dissimulant la triste vérité de ce film : il ne nous apporte rien, rien sur Lynch. Bon, il nous raconte son enfance, très heureuse apparemment, il nous parle de ses déménagements par-ci par-là mais quant au contenu de son oeuvre, nada.

Ce qui est dommage, vu ce que le maître produit. Je ne connaissais pas du tout son oeuvre plastique, mais dès les premières toiles, on sent que le monsieur est dérangé. Des tableaux absolument torturés, qui apparaissent à l'écran mais sans aucune explication, sans analyse générale, et on a juste un sentiment de malaise planant au-dessus de nous pendant tout le film -ce qui n'est pas une mauvaise chose pour autant. Sur la voix monochrome de Lynch, qui, très lentement semble à chaque instant chercher les mots justes, son univers fou ne nous est révélé qu'en surface, qu'en couleurs et en sons, mais pas en matière.

Mais l'atout indéniable de ce documentaire est qu'il nous montre le chemin parcouru par Lynch, la voie qu'il a empruntée et qui l'a menée jusqu'au cinéma. Notamment avec cette fameuse histoire de la toile qui bouge, qui l'inspire pour un premier court-métrage absolument terrifiant, L'Alphabet. On a donc une espèce de chronologie visuelle de l'univers de Lynch, indispensable en fin de compte pour comprendre son cinéma, mais tellement peu approfondie. La question que je me suis posée en sortant de la salle a été : qui est le plus fou, Lynch, ou moi, d'avoir cru qu'il se dévoilerait du jour au lendemain au grand public ? Malgré tout, je dirais quand même que c'est lui. Un vrai taré. Mais un vrai génie.