Il est loin le temps où le zombie faisait l’actualité au cinéma. Relégué au petit écran dans The Walking Dead, Dead Set ou encore Z Nation, le genre semblait avoir tourné casaque ces dernières années. Il y a bien eu World War Z en 2013, mais au vu de sa médiocrité, le film est à oublier. Dernier Train pour Busan arrive donc à point pour les aficionados et ce petit tour par la Corée à bord d’un KTX, le TGV coréen, annonce peut-être une renaissance du genre.


Jusqu’à présent habitué à tourner des films d’animation, le réalisateur Yeon Sang-ho se lance avec brio dans le réel. L’ultraviolence et l’hystérie collective qui codifient le cinéma coréen sont savamment utilisées pour rendre le Dernier Train pour Busan encore plus cinglant et sanglant. La sensation de vitesse qu’apportent le décor et les sons donne étrangement une impression de fluidité au film. Le réalisateur s’approprie cet espace confiné qu’est le train et exploite à fond chaque détail de cet environnement (toilettes, passerelles, fauteuils, bagages,…).


Habitué à réaliser une satire de la société dans ses films, Yeon Sang-ho s’attaque ici à l’individualisme que prône au début de la catastrophe le personnage de Seok-woo, véritable père indigne. Il dénonce également le despotisme d’une classe dirigeante, incarnée par le patron d’une entreprise de transport nationale, qui estime être au-dessus des autres hommes de par leur rang dans la société. Ce formidable méchant, aux allures de Pierre Gattaz, n'hésitera pas à sacrifier tous ses prochains, y compris femmes et enfants, afin de préserver sa minable vie.


L’idée la plus originale du film est l’incapacité des vivants à tuer les zombies. Le spectateur ne verra pas de têtes exploser comme de vulgaires pastèques. Les coups de poings ou de battes de nos héros permettent difficilement de se frayer un chemin ou de repousser un zombie, pas de les tuer. Nous sommes habitués aux films américains où une fillette de 10 ans peut sortir un fusil d’assaut de sous sa robe Hello Kitty, mais dans un pays civilisé où les armes à feu sont proscrites, le citoyen lambda se retrouve à se défendre avec les moyens du bord. Cette incapacité à éliminer définitivement le zombie qui veut becqueter du vivant apporte aux scènes de combat une crédibilité qui les rend d’autant plus haletantes.


L’aspect satirique du Dernier Train pour Busan rappelle les films du maître du genre, Romero. La comparaison, flatteuse, peut sembler disproportionnée, mais reste crédible au vu de la qualité de la mise en scène. Le cinéma coréen compte désormais une nouvelle corde à son arc avec un film de zombie qui deviendra, avec le temps, un incontournable du genre.

Vincent-Ruozzi
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le 24 août 2016

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Vincent Ruozzi

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