Qui est le film ?
Cinquième volet d’une saga amorcée en 2000, Destination Finale 5 tente de reconduire une formule dont l’usure est devenue manifeste. Réalisé par Steven Quale, collaborateur de longue date de James Cameron, le film sort en 2011 dans un contexte où la 3D, redevenue à la mode après Avatar, est moins un outil qu’un argument marketing. Ce n’est pas anodin : Destination Finale 5 est conçu comme une vitrine technologique autant que comme un récit.

En surface, l’histoire est fidèle à la ligne directrice de la série : un jeune homme a une vision d’un accident meurtrier (cette fois, l’effondrement d’un pont suspendu) qui lui permet de sauver quelques amis. Mais la Mort, frustrée, revient les éliminer un par un. Le schéma est connu. Ce qui change, ou tente de changer, c’est l’ajout d’un "twist" : tuer quelqu’un permettrait de prendre sa place dans l’ordre de la Mort. Une promesse dramatique, voire morale, qui aurait pu déplacer la saga vers un autre terrain si elle n’était restée à l’état de postulat.

Que cherche-t-il à dire ?
La force première de Destination Finale, à l’origine, résidait dans sa proposition : la Mort comme auteur, comme force impersonnelle agissant dans un monde de causes et d’effets, sans justification morale.

Dans ce cinquième film, l’ambition semble se perdre. Le propos, s’il existe encore, est écrasé par le souci de distraire. La Mort n’est plus figure ni principe, elle est mécanisme. Le monde ne conspire plus, il exécute. Le film fait mine de complexifier la mythologie, mais il ne fait qu’ajouter un détail à une formule qui ne produit plus rien, sinon des sursauts convenus.

La tension principale, survivre ou mourir,n’est plus qu’un prétexte. Il n’y a plus d’effroi existentiel, plus de trouble logique.

Par quels moyens ?
C’est sans doute le passage le plus ambitieux du film : l’effondrement du pont suspendu. L’usage de la 3D y est maximal, les effets nombreux, la mise en scène ample. Pourtant, malgré la maîtrise technique, rien ne trouble. Le découpage épouse une logique d’attraction plus que de tension. L’accident devient démonstration sans montée d'angoisse.

Il y aussi la scène où un personnage se rend chez un praticien et meurt empalé par une série d’aiguilles et d’objets médicaux. Ce qui frappe ici, c’est le manque total de tension préalable. La scène ne construit aucun faux rythme, aucun leurre, aucune temporalité déviante. Ce n’est plus la peur du déraillement, c’est le plaisir anticipé de la chute.

Une autre mort se déroule dans une salle de gymnastique. Le film y multiplie les faux signaux : clous, câbles, sol glissant… Mais la tension, au lieu de monter, se dilue. Trop de signes tuent le signe. Le montage ne joue plus la peur du détail, il joue la saturation. On devine que la mort viendra, mais on s’en fiche. L’horlogerie tourne à vide.

Le twist rétroactif du film, que les événements se dérouleraient en fait avant le premier Destination Finale, pourrait être malin. Mais il est plaqué. Il ne reconfigure rien de ce qui précède, ne donne aucun nouveau sens à l’histoire, ne crée aucune boucle émotionnelle. Il fonctionne comme clin d’œil, pas comme point d’ancrage. L’idée narrative reste désinvestie.

Où me situer ?
Face à ce film, je suis un spectateur lucide mais détaché. Je ne suis pas indigné, juste désintéressé. J’aurais pu admirer la tentative de renouvellement, j’y vois plutôt un vernis. Le film prétend raviver la saga, mais ne prend aucun risque réel, ni sur le plan de la narration, ni sur celui de la mise en scène.

Quelle lecture en tirer ?
Destination Finale 5 est l’exemple même d’un film qui semble cocher toutes les cases du genre. Il y a là une leçon : le cinéma ne se réduit pas à la technique, ni à la narration. Il réside dans un regard. Et c’est ce regard qui manque cruellement ici.

cadreum
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le 25 juin 2025

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