백두산 / Ashfall (Lee Hae-jun, Corée du Sud, 2019, 2h10)

Lorsque l’activité du Mont Barkdu, un volcan situé dans le nord de la Corée… du Nord, sur la frontière avec la Chine, c’est toute la péninsule qui est menacée par la destruction. Tout commence par un tremblement de terre ravageant les grandes villes, où les buildings s’écroulent comme des châteaux de cartes. Autant dire qu‘il y a urgence.


‘’Ashfall’, dont le titre original est plus pragmatique, puisqu’il signifie ‘’Mont Baekdu’’, est un film catastrophe misant à fond la carte du spectaculaire et de l’action. Aventure haletante en contre la montre, le récit défile à vitesse grand V. Alors qu’une nouvelle éruption, encore plus violente et destructrice, est attendu dans les heures qui suivent les premières secousses.


Un scientifique, Kang Bong-rae, ayant travaillé durant des années sur le volcan, mais que le comportement un peu farfelu a fini par le faire renvoyer, est contacté en urgence. Ce Dr Raoult de la sismologie coréenne s’avère être le seul à pouvoir gérer la crise. D’autant plus que trois ans en amont il avait prévenu que cette catastrophe allait se produire. Mais personne ne l’ayant pris au sérieux, il ne fût pas écouté. Puis soudain il est mené face à des autorités déboussolés.


Kang a bien une solution, mais elle est assez radicale. En plus d’être dangereuse elle est également un peu aléatoire. Comme il est le seul à proposer une action valable capable de sauver le pays, le président prend sur lui la décision de lui accorder du crédit. Le projet de Kang est assez simple. Les séismes engendrés par le réveil du volcan sont dû à l’activité de la lave, qui agit comme une cocotte-minute sur le point de siffler. Il propose ainsi de s’engouffrer dans les mines sous la montage, pour faire sauter les parois, libérer la lave, et relâcher la pression.


Sur le papier ça semble une idée parfaite, et la meilleure chance pour les autorités, autant au Sud qu’au Nord, d’éviter la catastrophe. Cependant plusieurs problèmes s’imposent, la charge nécessaire pour faire sauter la paroi doit être équivalente à celle d’une bombe nucléaire. Le Mont-Baekdu se situant à la frontière commune avec la Chine, cela revient à faire sauter une bombe atomique sur le territoire Chinois.


Bien entendu l’état-major s’emporte devant cette folie. Mais le président, ne lâche rien. Le temps est à la crise, et il n’y a pas une minute à perdre. Il fait monter une opération militaire, chargée de s’infiltrer en territoire Nord-coréen, s’emparer d’un espion emprisonné qui les mènera jusqu’aux mines, d’où ils poseront l’ogive nucléaire pour tout faire péter. Bien entendu, rien ne se déroule comme prévu.


‘’Ashfall’’ est un véritable film d’action, dans le sens le plus noble du terme. Blockbuster testostéroné, il accumule les séances spéculaires, auxquelles répondent les séquence d’actions. Bagarres, gunfights, explosions, courses poursuites, de ce côté-là le cahier des charges est admirablement bien remplit. C’est toujours divertissant, c’est toujours plaisant, et ça n’a absolument rien à envier aux autre production du genre.


Il est d’ailleurs assez étonnant de retrouver Lee Hae-jun au commande de ce projet. Après trois œuvres situées sur le prisme de la dramédie, pour cette quatrième réalisation c’est un changement de cap impressionnant auquel il se soumet. Un peu blasé, peut-être, par les échecs commerciaux de ses précédents films, qui malgré des critiques positives n’ont pas rencontrés le succès public. Il déclara même à cette occasion :


‘’Je réalise qu’en tant que réalisateur de film commerciaux, je ne peux juste pas faire le film que je veux faire… à la place, je dois prendre en compte le public. Je dois comprendre le fait que ma vision ne correspond pas nécessairement avec les attentes publiques, et il y a aussi la pression de parvenir à faire un retour sur investissement pour mes films.’’


Cette déclaration est loin d’être anodine, puisqu’elle fait écho à ‘’Ashfall’’, avec lequel il semble avoir embrassé l’aspect le plus commercial, épurant totalement son récit des thématiques développées dans ses précédentes productions. Ainsi les réflexions sur la ‘’différence’’ et la ‘’marginalisation’’ deviennent très secondaire. Étant à peine esquissées à travers Lee Joon-pyeong, l’espion nord-coréen forcé de collaborer avec des militaires sudistes, pour qui il éprouve un profond mépris.


Le film est assez impersonnel en fait, ne brillant pas vraiment par ses particularités. Si de nombreuses scènes sont impressionnantes et techniques, elles auraient pu être emballées par n’importe quel cinéaste. Les entorses formelles que Lee Heon-jun se permettait dans ‘’Des Nouilles aux Haricots Noirs’’ disparaissent. Sans pour autant nous retrouver face à une œuvre insipide, qui dans l’ensemble est bien mené. Il manque juste au film une identité bien marquée.


Cependant, sont abordées des problématique plus contemporaines. Au-delà des relation nord-sud, qui occupent une place importante dans le récit, car face à la catastrophe, comment doivent réagir les deux régimes ? Là est tout l’intérêt de la mission des militaires du sud, qui agissent en sous-marin dans un pays hostile. Mais surtout, ce qui marque est l’interprétation de la présence américaine.


Déjà dans ‘’Gamgi’’, film sur un virus hyper meurtrier sorti en 2013, il y avait déjà une représentation assez peu sympathique de l’ingérence américaine dans les affaire du pays. Dans ‘’Ashfall’’ C’est même par un regard particulièrement critique que cette ingérence est présentée, par le biais de l’armée ricaine. Outrepassant ouvertement le pouvoir présidentiel, et les décisions de l’état-major coréen.


Il existe encore aujourd’hui des accords militaires particulièrement forts entre la Corée du Sud et les États-Unis. La péninsule du Matin Calme est d’ailleurs l’un des membres les plus actifs de l’OTAN. Les pactes économiques sont également d’une importance capitale. Cependant, depuis le début de l’ère Trump, les relations tendent à se refroidir.


L’omniprésence e l’Oncle Sam dans un pays économiquement indépendant, qui est même l’un des plus riches et des plus avancés de la planète, a de quoi diviser. Il n’est pas rare, dans une production cinématographique majoritairement libérale, que des critiques particulièrement acerbes soient déclinés à l’encontre du comportement impérialiste des États-Unis. Reflétant par là une pensée présente au cœur d’une population, voyant d’un mauvais œil l’omniprésence d’un allié envahissant.


C’est là l’un des propos de ‘’Ashfall’’, qui n’y va pas de main morte. Tout comme dans sa représentation des forces Nord-coréenne, qui ne fait pas vraiment dans la dentelle. Plus proche de criminels cinégéniques stéréotypés, que de militaires. Ce manichéisme un peu naïf est un reproche qu’il est possible de faire au métrage Lee Hae-jun, et sa lecture ‘’les gentils contre les méchants’’. Les personnages étant identifiable selon cette simple caractéristique.


Inégale, pas toujours maîtrisé, un petit passage à vide vers le milieu, le film peine à convaincre totalement. Si le spectacle est au rendez-vous, et qu’il est particulièrement plaisant à suivre, rappelant les films d’actions/aventure hollywoodien de la fin des années 1990, il est dommage que le métrage ne dépasse jamais vraiment son postulat de départ. Ni ne transcende le genre auquel il appartient.


Si de nombreuses de pistes réflexives sont présentes dans le scénario, elles ne sont jamais totalement exploitées. Ce qui fait que le film n’évite pas de sombrer dans des séquences clichées, vu et revu mille fois. Dès lors, l’ensemble de l’aventure se résume à un axe principal, celui de faire sauter le volcan, et ne s’en éloigne qu’à de très rares occasion, donnant une sensation d’inachevé.


En ne conservant que l’essentielle, qui est au final une course contre la montre plutôt bien mené, malgré quelques raccourcis scénaristiques, que trahissent des facilités d’écriture, et des dialogues peu finauds, en résulte un métrage assez banale. On était en droit d’attendre mieux de la part du cinéaste ayant livré ce chef d’œuvre existentialiste qu’est ‘’Des Nouilles aux Haricots Noirs’’. Mais bon, c’est peut-être à voir comme la récréation d’un metteur en scène qui s’essaye à autre chose. Visuellement abouti, mais formellement un peu limité.


-Stork._

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le 12 mai 2020

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