Un peu de contexte historique, aux prémices de la première guerre mondiale, plusieurs millions de noirs américains quittent les états racistes du sud et les champs de coton, direction le mirage des états du nord progressistes, et en particulier la ville de Detroit où les emplois dans l'industrie promettent une vie meilleure à tous ces gens. Las, si le racisme était institutionnalisé dans les états du sud, celui-ci n'en est pas moins absent des états du nord, de façon plus larvée, mais quand à la fin de la seconde guerre mondiale, la population blanche migre massivement vers les banlieues des grandes villes américaines, abandonnant les centres villes aux populations noires, y créant des ghettos d'où les emplois disparaissaient et où la misère et le chômage, et tout ce que cela entraîne en termes de délinquance devenaient la norme.
Dans les années 60, alors que la majorité de la population de Détroit est noire, sa police elle est constituée à 95% de blancs, réputée violente et raciste, cette dernière harcèle quotidiennement la population, multipliant les arrestations arbitraires, les exactions violentes à l'encontre en particuliers des jeunes hommes noirs, un climat de tensions extrême plane sur la ville.
Lors d'une énième et injustifiée descente de police en 1967, de violentes émeutes éclatent, que les autorités entendent mater avec le concours de la garde nationale, déployant l'armée et faisant de Détroit une véritable zone de guerre.
C'est dans ce contexte historique que la dramatique histoire au coeur du film de Kathryn BIGELOW prend place.
Dans un motel épargné par les violences et les pillages, quelques noirs passent la nuit, pour éviter les problèmes et respecter le couvre feu, quand des tirs d'arme factice sont dirigés contre une unité de la garde nationale, entraînant une descente démesurée de la police de Détroit.
Cette dernière investit le motel et débute alors sous les silences complices ou les refus d'intervenir de la garde nationale et de la police d'état, un véritable jeu de sadisme et de tortures physiques et psychologiques contre tous les résidents du motel, majoritairement des jeunes afro-américains mais aussi deux jeunes femmes blanches venues en vacances depuis l'Ohio, pour goûter à la vie nocturne et musicale d'un des berceaux les plus emblématique de la musique américaine depuis des décennies.
Nous plongeons alors, par le biais d'une mise en scène naturaliste et fiévreuse, dans l'horreur qu'a été cette nuit pour ceux qui l'ont vécue, car confirmé par l'insert d'images d'archives, il s'agit d'une histoire vraie. Trois agents de la police de Détroit, terrorisent ce groupe, simulant des exécutions pour forcer la parole de ceux qu'ils considèrent comme coupables, tuant trois jeunes dont ils prennent soin de maquiller les meurtres en faits de légitime défense, multipliant avec une férocité qui n'a d'égal que leur racisme avoué et assumé les pressions sadiques.
Quand finalement, alors que la culpabilité des policiers est établie et que leur procès se tient, on pense que justice sera rendue, mais bien vite la tournure des débats ne laisse aucun doute quant à l'issue.
Film coup de poing, leçon de cinéma, le film regarde en face une sombre page de l'histoire américaine, où les protagonistes nous renvoient à quelques autres sordides histoires de crimes racistes et de violence policières que ce soit aux USA ou chez nous, et le leitmotiv "black lives matters" ou le slogan "ACAB" résonnent et nous oblige à considérer cette réalité.
Le casting est brillant, Algee SMITH, Jacob LATIMORE nous incarne la justesse de vies réduites à la terreur, Will POULTER en flic sadique crève l'écran et dans un rôle absolument maîtrisé de bout en bout, John BOYEGA démontre que si sa prestation dans la post-logie star wars n'a pas convaincue, elle n'est pas à cause de son talent de comédien, mais bien les conséquences d'un personnage sans relief et profondeur.
Un must see absolu pour découvrir une histoire vraie, dramatique, injuste mais qui hélas n'est pas isolée dans l'histoire de l'Amérique.