Pour le commun des mortels, le cinéma Italien, c’est assez obscur. Il faut le dire, du côté des personnalités ça se limite à Begnini, Monica Belluci, Lino Ventura ou encore Sergio Leone ; et en film on ne retient que Salò ou les 120 Journées de Sodome (de Pier Paolo Pasolini en 1976), La vie est belle (de Roberto Begnini en 1997) et les Western Spaghetti. Mais en grattant un peu on trouve des petits chefs-d’œuvre. Aujourd’hui je souhaiterais vous faire partager une pépite du cinéma italien, un film politique et engagé : Diaz : un crime d’Etat (de Daniele Vicari en 2013). Dans le film, nous retrouvons Claudio Santamaria, Jennifer Ulrich, Elio Germano ou encore Ralph Amoussou, si les noms ne vous disent rien c’est normal, même internet a du mal avec eux. Et à la musique Teho Teardo est aux manœuvres.

Tirée d’une histoire vraie, l’histoire prend place à Gênes, en 2001, où le sommet du G8 est organisé. Alors, des groupes anarchistes, altermondialistes et pacifistes manifestent sans violence pour la « justice dans le monde ». Mais le débordement d’un groupe de casseurs, met le feu aux poudres : voitures brulées, pillages etc… Par la suite, alors que les manifestants pacifistes, mais aussi quelques casseurs sont regroupés dans une école primaire, pour y dormir et y fonder un pôle d’information, les forces de l’ordre italiennes envoient quelques trois cent policiers durant la nuit à cette école. S’en suit un matraquage honteux sans distinction (hommes, femmes, jeunes, personnes plus âgées, manifestants et même journalistes). Suite au tabassage par les forces de l’ordre, certaines victimes sont envoyées au commissariat en attendant que des preuves soient falsifiées ou même crées de toutes pièces et subissent une longue liste de maltraitances en tout genre (matraquage, humiliations, nudité forcée…).

En effet le scénario est très dur, et la mise en scène l’est tout autant, au point où nous nous voyons vraiment dans les couloirs de l’école entre les policiers et les manifestants. La mise en scène rappelle les films de guerre américains des années 1960 sur la guerre du Viêt Nam avec un point de vue très immersif dû à la présence de journalistes au plus près des soldats filmant toutes les atrocités de la guerre. Ici, remplacez le Viêt Nam par une école, les Vietnamiens par des manifestants, les américains par des policiers et vous avez le compte rendu de la mise en scène. Chaque scène est frappante de réalisme, à tel point que, même en ayant vu un grand nombre de « films chocs » mes entrailles ont par moment eu du mal à suivre les images. Le récit lui, suit plusieurs lignes narratives concentrées sur des personnages précis tels que : des casseurs, des pacifistes, un chef de police. Toutes ces lignes réunies autour du même événement (une bouteille lancée vers les policiers et qui se casse au sol) permettent de ne jamais être perdu dans la narration, ce qui est très appréciable.

Dans l’ensemble les acteurs, bien que très peu connus, sont très performants et transmettent des émotions très fortes. Ils n’ont pas eu peur de s’impliquer physiquement, notamment lors des scènes fortes durant la détention des altermondialistes, et c’est à ça que l’on reconnait les bons acteurs, s’approprier son personnage jusqu’au bout. L’autre élément qui fait passer les émotions les plus fortes, c’est la musique. Les rythmes sont adaptés à chaque mouvement faisant passer une sensation très prenante d’action. En somme, la musique est autant nécessaire dans Diaz que dans C’est arrivé près de chez vous (de Rémy Belvaux, André Bonzel, Benoît Poelvoorde en 1992) où retirer la musique vous donne un film tout bonnement insoutenable de violence.

La violence, voilà ce qui résume ce film… La violence développée dans ce long métrage est magnifique. Par « magnifique » je veux dire que l’esthétique et le réalisme mis en place autour de cette violence vous frappe en plein cœur, au plus profond de vos trippes même. Elle fait réagir et réfléchir à tel point que nous avons l’impression d’avoir subi nous aussi les actes de barbarie nommés précédemment. En conclusion, je dirais que l’avenir du cinéma politique et engagé se trouve là, dans ce film, car j’ai vraiment ressenti que le réalisateur s’adressait à nous en nous disant « Voilà ce qui s’est passé, et tu vas le voir comme si tu y étais, tu vas le vivre, et tu diras même : merde, j’y étais ».


Alexis Depagne
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le 23 janv. 2014

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