En tant que spectateur, j'ai souvent été fasciné par la capacité d'un réalisateur à transformer un concept simple en une œuvre d'une tension implacable. C'est précisément ce que parvient à faire Steven Spielberg avec Duel, son premier long-métrage télévisuel devenu un classique du thriller. Le film est une masterclass de minimalisme anxiogène, où le banal trajet d'un représentant de commerce se mue en un cauchemar existentiel. Ce face-à-face entre une berline insignifiante et un poids lourd menaçant et sans visage est une pure distillation de la peur et de la rageau volant.
Le Cœur du Conflit : L'Homme contre la Machine
- Duel est avant tout une expérience sensorielle. Le film s'ouvre sur David Mann (Dennis Weaver), un représentant de commerce moyen, qui se lance dans un voyage d'affaires. Sa vie tranquille bascule lorsqu'il dépasse un vieux Peterbilt 281 rouillé et crasseux sur une route déserte de Californie. L'acte anodin de dépasser devient l'étincelle d'une poursuite infernale. Le camion, dont on ne voit jamais clairement le conducteur, prend une dimension monstrueuse et impersonnelle, devenant la personnification du mal arbitraire et de la mécanique de mort.
- Spielberg, avec une maîtrise étonnante pour un jeune réalisateur, utilise le montage serré et des angles de caméra ingénieux pour amplifier l'isolement et la claustrophobie de Mann. La menace n'est pas un ennemi humain complexe, mais une masse de métalhurlante et implacable, rendant le duel profondément archétypal.
Un Personnage Oubliable
- Le seul bémol notable, qui empêche le film d'atteindre une note plus élevée, réside dans le personnage de David Mann lui-même. Il est intentionnellement conçu comme un homme ordinaire et lâche, un archétype de la passivité américaine de l'époque, pour que le spectateur puisse s'identifier facilement. Cependant, ses monologues intérieurs et sa panique parfois excessive peuvent devenir légèrement répétitifs et fatigants à la longue. L'efficacité du film repose moins sur l'empathie pour Mann que sur la terreur suscitée par le camion.
Conclusion : Duel est un chef-d'œuvre de l'économienarrative. Il parvient à maintenir une tension insoutenable pendant près d'une heure et demie avec presque aucun dialogue significatif et deux "personnages" principaux : un homme et un camion. C'est une œuvre fondatrice qui a non seulement lancé la carrière de Spielberg, mais a également posé les bases de son cinéma d'effroi simple et direct, où la menace peut surgir de l'endroit le plus inattendu.
Le film est essentiel pour les amateurs de thrillers et de cinéma de genre. Il vous tiendra agrippé à votre siège et vous fera regarder deux fois dans votre rétroviseur la prochaine fois que vous croiserez un semi-remorque.