Comme une critique agressive du premier n'aurait pas été productive, je m'étais retenue lors de sa sortie.
Immense fan des livres, que j'ai du relire au moins 10 fois, déçue par les autres adaptations, je n'ai jamais imaginé que le travail de Villeneuve rendrait vraiment justice à l’œuvre au départ.
Le premier film m'avait laissée songeuse. Le rythme n'était pas très bon, les scènes de batailles ou de groupe me paraissaient souvent ratées, la photo terne, l'ensemble dégageant l'impression qu'il fait froid plutôt que chaud, des décors vides et une CG visible... tout ces éléments plombaient largement les aspects positifs : des scènes d'intimité et un jeu d'acteur convaincants et émouvants.
Et puis surtout, il faut se l'avouer, on avait pas l'impression que Villeneuve avait jamais vu du sable dans sa vie.
Cette vision de Dune ne me convenait pas.
Le second réussit à résoudre une partie des défauts du premier : le sable, la dureté du désert, tout cela est bien filmé, bien montré. Les vers des sables sont enfin réellement impressionnants, vertigineux et puissants.
Bien géré, le rythme est haletant (je n'ai pas vu passer les quasi 3h).
Et, alors que je m'attendais à une catastrophe concernant le jeu d'actrice de Zendaya (Chani), que j'avais trouvée mauvaise dans le premier, elle apporte bien quelque chose au rôle (auquel je n'adhère pas, mais on va y venir).
L'esthétique de la maison Harkonnen est très réussie, un point bonus pour la planète Harkonnen ou le spectre lumineux rend tout noir et blanc, et pour Feyd-Rauta que j'ai trouvé plus subtil que dans le livre.
Certaines qualités du premier persistent : Les scènes d'intimité sont toujours bien filmées, transmettent des émotions. On perd la relation mère fils qui était très réussie, mais dans le livre, elle se distend également.
Formellement, le travail du son est excellent (le fait que je l'ai vu en salle dolby atmos lui a rendu justice). Merci Hans Zimmer !
On voit bien aussi ce que Villeneuve a voulu faire du film : une critique de la colonisation et du sauveur blanc, qui est bien montrée par les positions des fremens et leurs clivages internes.
Cependant, ce sont les coupes scénaristiques qui m'ont posé problème.
En effet, on perd un élément majeur du livre : l'épice. On en parle un peu. Mais jamais il n'est répété ou dit pourquoi elle est importante dans ce film et en particulier pourquoi l'Empereur est obligé de rendre son trône. Elle est pourtant là. On la voit briller façon paillettes d'Edward dans Twilight. Exit la guilde et son importance, exit les mentats. Pourquoi les avoir introduits dans le premier film ? Mystère.
On sent que Villeneuve ne savait pas s'il allait pouvoir en faire un deuxième, et tout ceci sent le parfum du "mal planifié".
Autre point négatif : le personnage de Chani a été tordu jusqu'à en devenir méconnaissable. Et, c'est bien dommage, le froncement de sourcils de Zendaya ne suffit pas à en faire une femme forte. Sa contestation de l'aspect messianique de Paul n'est pas non plus très utile. Si la Chani du livre a le cœur brisé quand Paul se retrouve fiancé et marié à Irulan, la fille de l'empereur, elle sait bien que l'impératrice aura une vie maritale inexistante. Chani, épouse officieuse, ne fait jamais sa rebelle façon adolescente mal lunée qui se fait piquer son petit ami par une fille populaire. Elle a un aspect raisonnable et pratique malgré son côté impulsif, qui s'intègre dans son aspect résolument "badass", un mélange entre une femme qui assume ses émotions, qui sait se battre et qui met les mains dans le camboui et ne fuit pas ses problèmes.
Et le souci est relié à la jeunesse des acteurs. Paul est un homme fait quand l'empereur débarque sur Arrakis dans le livre.
Il a eu le temps de s'intégrer, de devenir réellement Fremen. Et donc le montage et le temps du cinéma gomme leur aspect adulte pour laisser un spectre émotionnel d'adolescent, une relation immature de quelques mois seulement. Comment avoir le sentiment d'appartenir à un peuple, à une culture, en quelques mois ? N'est-ce pas présomptueux ?
Également, la fin abrupte qui se termine sur des sourcils froncés ne me donne pas envie d'aller voir la suite. Parce que, oui, j'ai découvert à ce moment là qu'on serait dans une fameuse "trilogie tire-pognon". Le film est qualitatif, mais il aurait du conclure de façon élégante et plus décisive.
Sur une note plus positive, le personnage de Stilgar, source sans fin de futurs memes sur internet, m'a bien fait rire avec le reste de la salle, allégeant l'ambiance et générant des moments d'humour savoureux sur la question des croyances et du fanatisme dans ce qu'il a de plus simpliste.
Paul lève le bras. Stilgar **Il lève le bras comme la prophétie... LISAN AL GAIB ! **