Elio
6.4
Elio

Long-métrage d'animation de Madeline Sharafian, Domee Shi et Adrian Molina (2025)

Depuis le décès récent de ses parents, le jeune Elio vit avec sa tante Olga. Introverti, il n’a qu’un rêve : entrer en contact avec les aliens, avec lesquels il se sent plus de points communs que ses décevants compatriotes de la Terre. Un jour, les aliens répondent à ses appels répétés, et l’emmènent dans le Communiverse, un lieu rassemblant des ambassadeurs de différents peuples de la galaxie. Pris pour le chef de la Terre, Elio reçoit alors une mission : pour devenir ambassadeur de la Terre, il va devoir lutter contre le terrible chef de guerre Grigon, qui veut imposer la terreur sur le Communiverse…


Depuis En avant, en 2020, Pixar semblait avoir largement perdu de sa superbe. Soul, Luca, Élémentaire ou Vice-versa 2 étaient tous sympathiques, ils rataient le créneau de chef-d’œuvre qu’ils auraient pourtant chacun pu occuper sans problèmes. Quant aux décevants Alerte rouge et Buzz l’éclair, ils semblaient annoncer le retour de Pixar dans le rang des films d’animation bien faits, mais sans âme.

On ne savait donc sur quel pied danser en attendant Elio, projet entamé par Adrian Molina, co-réalisateur du chef-d’œuvre Coco, et repris en main par Domee Shi, réalisatrice du fade Alerte rouge. Dieu merci, on est plus proches de Coco, tant l’univers d’Elio renoue avec les plus grandes réussites des studios à la lampe. Son univers est une merveille de conception, et on sent le travail incroyable des animateurs pour donner vie à chaque détail qui transforme n’importe quel plan en un merveilleux jeu de piste pour le spectateur, toujours à la recherche du plus petit gag visuel, qui donne son véritable sel au film. D'autant que les adultes auront de quoi s'amuser à chercher le nombre impressionnant d'allusions cinéphiles qui parcourt l'œuvre !

Ainsi, c'est la principale bonne surprise du film, Elio séduit par une direction artistique bien plus poussée que ne pouvaient le laisser penser les bandes-annonces. C’est un pléonasme de le dire, mais le travail sur les textures et les lumières est une nouvelle fois d’une époustouflante beauté. Alors que les bandes-annonces paraissaient un peu ternes (pour du Pixar, entendons-nous), le produit final est vraiment somptueux, et nous réserve quelques séquences d'une perfection visuelle impressionnante, qui nous laissent imaginer le travail qu'il y a dû avoir derrière sans qu'on réussisse - sans doute - à en concevoir l'ampleur.


Ce qui frappe aussi, c'est l'extrême qualité de l'écriture. Certains parallèles sont proprement géniaux, même si pas toujours très originaux. On pense évidemment à la question sur la recherche de l'autre à travers l'espace, qui se fait ici l'écho de diverses formes de solitude (qu'il s'agisse d'Elio ou de sa tante). Les deux images sur lesquelles le film fait claquer la fameuse réplique : "Sommes-nous seuls dans l'univers ?" a de quoi ne pas laisser indemne un spectateur endurci. De la même manière, la façon dont Elio met en parallèle ses deux jeunes protagonistes nous rappelle la finesse qui aurait toujours dû être la marque de fabrique du studio. Là où Glordon aurait pu être l'insupportable sidekick qu'on a toujours envie de baffer, ses dialogues sont si bien écrits qu'on s'attache très vite à lui, et qu'on ressent vraiment une très forte empathie pour lui, ce qui est un tour de force pour un personnage sans yeux.

A cette image, d'ailleurs, remarquons qu'Elio a le bon goût de ne jamais laisser un seul de ses personnages sur le bord de la route. Ainsi, le scientifique merveilleusement doublé par Jamy Gourmaud trouvera son heure de gloire plus loin dans le récit, et même si on s'en doute dès le début, la manière dont c'est fait s'avère particulièrement réjouissante, en plus de nous délivrer un petit message d'espoir en l'humanité fort bien senti et particulièrement grisant.


Enfin, la bonne surprise se trouve aussi en partie dans les enjeux, tant la réflexion autour du deuil d'un proche, de la solitude et de la difficulté d’être parent sont abordés avec beaucoup de délicatesse. Normalement, c'est aussi un pléonasme de le dire, mais Pixar s'était révélé assez décevant dans la plupart de ses précédents films sur le sujet. Ici, même si on n'y revient jamais tout à fait, on sent une profondeur émotionnelle qui nous rapproche des films les plus émouvants du studio. Même en n'ayant pas pleuré, je dois dire que l'émotion était là à plusieurs moments du film. Enfin, Pixar réussit à nouveau à nous faire ressentir ce que ressentent ses personnages, qu'il s'agisse de la tristesse d'Elio au début du récit, de la détresse de sa tante qui ne sait pas comment s'occuper de lui correctement, et surtout cette terreur de l'enfant en entendant ses harceleurs s'approcher de lui sans pouvoir rien faire pour leur résister. Une scène pourtant assez soft dans son approche, mais qui réussit à nous faire mesurer l'horreur de ce que peut être le harcèlement. Là-dessus, rien à dire, on retrouve le Pixar des grandes heures !

Toutefois, peut-être ont-ils un peu manqué de puissance au moment où ils en avaient le plus besoin, et il sera permis de trouver le climax un peu court sur le fond… On n'en dira rien, mais si le discours qu'y tiennent les personnages centraux est assez époustouflant de justesse, il est dommage qu'il se réduise à deux ou trois répliques seulement, alors qu'il appelait facilement à un (petit) développement.


Cela ne gâche que très peu la qualité d’un film d’animation qui, s’il n’égale pas les chefs-d’œuvre du studio, figure tout de même parmi ses gros calibres. En tous cas, après leurs errances récentes, voir Pixar renouer avec le divertissement familial, joyeux, coloré, mais aussi profond, et qui sait parler à tous les publics, a quelque chose d'éminemment rassurant. J'avais craint de voir les studios disparus à jamais, laissons-leur une chance : peut-être sont-ils vraiment de retour ? On les attend au tournant sur leur prochaine production.



Tonto
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Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à ses listes Les meilleurs films d'animation Pixar, Les meilleurs films avec des extraterrestres et Les meilleurs films de 2025

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le 21 juin 2025

Modifiée

le 21 juin 2025

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Tonto

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