Cinéaste franc-tireur nourri aux films d'horreur des années 50-60, dont la production se situe à l'opposé du cinéma de genre produit en masse par les majors et autres grands studios (la franchise Vendredi 13 au hasard), Frank Henenlotter pourrait aisément être présenté comme le chaînon manquant 80's entre William Castle et John Waters. Proche de l'underground de par les maigres budgets alloués à ses films, le réalisateur revenait en 1988, six ans après son culte Basket Case avec sa nouvelle création, Brain Damage, relecture à peine voilée de son premier long métrage. De ses six longues années de frustration et de lutte contre une industrie ne lui proposant que des scénarios de sous-slashers, le déterminé new-yorkais marquait, de nouveau, de son empreinte le cinéma de genre avec un conte horrifique à l'humour très noir, et à la clef une seconde œuvre culte.


Sorti en catimini aux États-Unis, avant de connaitre, quelques temps plus tard, une reconnaissance méritée en VHS, Brain Damage s'inscrit, sans surprise, dans la continuité du précédent long métrage de Frank Henenlotter. Doté une fois encore d'un budget modeste (mais bien supérieur à celui de Basket Case), lui offrant suffisamment de liberté pour n'avoir de compte à rendre à personne, le réalisateur a pu profiter de ce confort, tout relatif, pour mener à bien le tournage (plus de deux mois) et la production de son second film. Dont acte.


Fidèle à New-York, tel le précité John Waters l'est à Baltimore, Brain Damage s'inspire, du propre aveu de Frank Henenlotter, du Désosseur de cadavres (1959) de William Castle et de The Trip (1967) de Roger Corman. Du parasite originel qui grandit dans la colonne vertébrale aux délires hallucinatoires provoquées par le LSD, Henenlotter y ajoute, en sus d'un mauvais goût assumé, toujours le même penchant prononcé pour les lieux interlopes, casse de voitures, boîte de nuit mal famée et autre hôtel miteux. Gore, outrancier, l'horreur du film ne fait pas dans la demi-mesure, sans être frontalement gratuite. Au contraire, Henenlotter frappe là où ça fait mal, aux initiés d'avoir l'estomac bien accroché, et autres passer leur chemin. Et à ce petit jeu-là, la scène de la chaufferie, ou les affres d'une dame alléchée par le supposé membre démesuré que cache Brian dans son pantalon, "c'est un vrai monstre qui se cache là-dedans", reste sans conteste l'une des plus craspecs qui soit.


De cette histoire tragique, sinon pathétique, d'un jeune homme qui rompt avec la cellule familiale incarnée par son frère et sa petite amie, le scénario écrit par Frank Henenlotter jongle avec brio avec le mélange des genres. Proche de l'humour de Basket Case (Kevin Van Hentenryck alias Duane Bradley y fait une brève apparition), celui usité par Brain Damage se veut encore plus féroce et pervers à l'image du comportement cynique du maître-parasite qui a jeté son dévolu sur l'innocent Brian (la scène du sevrage est d'une incontestable cruauté en plus d'être immonde). Et personne ne sera épargné.


Soutenu par des effets spéciaux dégoulinement efficaces, des maquillages dirigés par le débutant Gabe Bartalos qui avait déjà fait ses preuves dans Massacre à la tronçonneuse 2, à l'animatronique gérée par David Kindlon (From beyond: Aux portes de l'au-delà), Brain Damage est, on l'aura deviné, une perle d'humour transgressif à ne pas mettre en toutes les mains, en attendant la relecture tout aussi barrée, deux ans plus tard, du mythe de la créature de Frankenstein, Frankenhooker.


Culte.


http://www.therockyhorrorcriticshow.com/2017/10/brain-damage-frank-henenlotter-1988.html

Claire-Magenta
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le 2 nov. 2017

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