Joseph K n'est pas mort "comme un chien", il a survécut au Procès. Aujourd'hui il a une femme, un enfant né prématurément, et est toujours amoureux de sa voisine.
C'est ainsi que l'on pourrait se positionner pour appréhender ERASERHEAD.
Chris Rodley "- C'est indubitablement le nom de Kafka qui vient à l'esprit pour Eraserhead. Vous aimez son oeuvre?"
David Lynch "- Oui. Le seul artiste dont je me sens le frère est Franz Kafka. Je l'aime vraiment. Certains de ses bouquins sont les plus extraordinaires combinaisons de mots que j'ai jamais lues. Si Kafka avait écrit un thriller, je foncerais tout de suite. Ce serait un film que j'aimerais mettre en scène."
(David Lynch, Entretiens avec Chris Rodley, Cahier du Cinéma)
Une créature, vivant recluse dans une cabane branlante au beau milieu d'une planète inconnue, actionne les commandes de la vie d'Henry Spencer. C'est après plusieurs mois passés en pensant avoir été quitté par Mary, qu'il va diner chez les parents de cette dernière et découvre la nouvelle: Elle était enceinte et à accouché d'un enfant prématurément. Henry va s'occuper seul de cette progéniture étrangement ressemblante à un ver ou à l'aspect grossit de sa propre semence.
Entre délire et réalité, on ne s'y retrouve pas trop. Par exemple, la relation qu'il a avec sa voisine, n'est en réalité qu'un fantasme parmi tant d'autres, qu'il n'arrive pas à différencier de sa vraie vie. "Une Histoire Vraie" aurait-il pu être le titre du film? Mais "Rien n'est vrai, tout est permis" nous rappellent Altaïr et Ezio Auditore, grands admirateurs d'Hassan ibn al-Sabbah et lecteurs assidus de Friedrich Nietzsche.

La jeune femme blonde sur scène ne cesse de chanter qu'au "paradis, tout est bien", alors qu'elle écrase les petits ver/spermatozoïdes avec ses pieds. Le refuge théâtral derrière son radiateur finit par le confronter à ses responsabilités, alors qu'il essaie tant bien que mal d'y échapper. Sa tête n'en peut plus et se détache de son corps. Le crâne s'ouvre, laissant apparaitre son cerveau. La tête est ramassée par un petit garcon qui va fournir un fabriquant de crayon. Un échantillon du cerveau est préélevé, et est utilisé afin d'équiper les crayons d'une gomme. Le test est concluant, la tête efface. Eraser Head.
Henry émerge de son rêve. Ne supportant plus le nourrisson qui ne cesse de rire, il découpe le bandage qui enroule l'enfant et laisse appaître ses organes vitaux. Henry tue sa "création". Les éléments se déchaînent autour de lui, mais la dame du radiateur vient le prendre dans ses bras, et le rassure.

Une expérience unique en son genre, avec des images d'extérieures très orson-wellesiennes qui laisse entrevoir le potentiel lynchéen de ce réalisateur si kafkaien.
Hey_Blondin
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le 9 oct. 2011

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Hey_Blondin

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