Troisième film de Jacques Becker, celui-ci s'intéresse à un univers qu'il connait bien, de par sa mère ; la haute couture. On suit un créateur, incarné par Raymond Rouleau, toujours en retard, qui n'arrive pas à se décider sur le choix de ses robes, et qui se montre méprisant avec les petites mains qui composent ses œuvres. Séducteur invétéré, il rencontre la fiancée de son meilleur ami, et se prend à vouloir la conquérir, alors qu'elle veut intégrer le milieu de la mode.


Avant toute chose, il faut rappeler que ce film a été tourné durant l'Occupation, ce qui explique sans doute qu'il est entièrement composé en intérieurs. Mais ça montre aussi le cocon dans lequel s'immerge ce Clarence, qui n'aime sans doute pas sortir, et dont la vie se résume au travail et aux conquêtes. J'avoue avoir eu un peu de mal avec Raymond Rouleau, dont je trouve qu'il rend le personnage antipathique, très froid avec tout le monde, et qui ne se prend pas pour une mandarine ; à un moment donné, il se nomme même Dieu ! C'est dommage, car il représente aussi ce que je reproche au film ; sa froideur, son manque d'émotions, comme si tout le monde était distant. Il y a tout de même cette fin déchirante mais magnifique où la passion d'un créateur vis-à-vis de son art se confond avec son amour perdu, pour le meilleur et surtout pour le pire.
Il y a aussi Micheline Presle, qui incarne cette jeune fille qui, comme on disait jadis, monte sur Paris pour travailler et rejoindre son fiancé. Elle incarne, elle aussi avec froideur, une femme ambitieuse, caractérielle, dont la passion de Clarence à son encontre la fait flancher, mais qui n'évolue pas des masses.


Mais il y a une chose que Jacques Becker réussit très bien, et que personne n'a fait aussi bien dans le cinéma français ; la description du milieu de la mode. Je reprochais ça, pour un exemple récent, au film sur Yves-Saint-Laurent, où le personnage avait l'air de créer des vêtements comme on change de chemise. Là, on voit très bien ce couturier galérer, faire sans arrêt des essayages sur des modèles, dessiner, confier ses ordres à des petites mains qui vont reproduire ce qui lui a en tête. On voit très bien l'aspect du tous derrière notre chef, unis pour une vision, mais on en voit aussi les effets pervers, à savoir l’irritabilité du chef, ses coups de sang, il parle très mal à son équipe, et semble plonger dans une folie créatrice qui a l'air de l'emmener ailleurs où seul des femmes peuvent le repêcher.


C'est ainsi que j'ai découvert Falbalas, un peu déçu sans doute eu égard à ses critiques dithyrambiques, mais ça reste un objet passionnant pour qui veut voir un créateur au travail et les dommages collatéraux que ça occasionne, y compris au niveau du cœur.

Boubakar
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le 12 avr. 2017

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Boubakar

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