Vous est-il déjà arrivé de visionner film, puis de vous demander à la fin de la séance si ce que vous veniez de voir vous avait plu ? Un film que vous avez aimé sans aimer ? Mieux : vous est-il arrivé de repenser au film en question, longtemps après l’avoir vu (plusieurs années), au point d’en avoir oublié jusqu’au titre, et malgré cela, d’avoir envie de le revoir ? Eh bien, c’est exactement ce qui m’est arrivé avec Fin. C’était comme une sorte d’énigme qui ressurgissait tout à coup et à laquelle j’avais de nouveau envie d’être confrontée.
Avec cette suite de mots clé : film fin du monde personnages disparaissent, je l’ai tout de suite retrouvé : il s’agissait de : Fin, (The End), de Jorge Torregrossa.
Je l’ai revu. Avec la même surprise et le même sentiment d’étrangeté. Sauf que cette fois, je peux dire que j’ai beaucoup aimé. En allant à la pêche aux commentaires, j’ai constaté que bien des personnes reprochaient à l’œuvre de Torregrossa un manque d’action, d’explications. Mais Fin n’est pas un hamburger. Un truc standardisé, prêt-à-ingurgiter. Fin n’a rien à voir avec une superproduction hollywoodienne. Pas de scènes de sexe, pas de dépravation, pas de violence gratuite, pas de symboles cabalistiques, pas de rivières de sang. Il n’y a absolument rien de tout ça dans ce long métrage. Juste une exploration intellectuelle portée par de très beaux visuels ; l’ensemble étant parfaitement accordé. Du (très) bon cinoche, en somme.
Le réalisateur nous propose le cheminement d’hommes et de femmes, tous animés de sentiments diversement complexes, occupés comme tout un chacun à patauger dans une existence plus ou moins réussie. Soudainement, un évènement (peut-être une impulsion électromagnétique, on ne sait pas trop ; ce qui somme toute est sans importance), les confrontent à l’inconnu. Un phénomène qui va tous les conduire au bord de leur propre existence. Dès lors, ce sont les derniers moments, les dernières paroles, les dernières ou les premières compréhensions. Au bord de la vie. Au bord de l’inconnaissable.
Faisant évoluer ses personnages au cœur de paysages époustouflants de beauté, où seuls, les animaux paraissent ne pas avoir été touchés par le drame, avec Fin, le réalisateur fait du pied à la sensibilité du spectateur, le pousse à réfléchir et à s’investir, à s’interroger sur ce qui l’entoure : sa vie, ses proches, ce qui lui fait peur, ce qu’il ne comprend pas, ce qu’il voudrait comprendre, tous ses espoirs, l’éventail de ses regrets. Fin est le genre de film qui peut vous balader longtemps dans le dédale des questionnements sans fin sur la vie, la mort, et le pourquoi du comment.
Un Prix spécial du jury, au festival international du film fantastique de Gérardmer 2013, amplement mérité et justifié.