Floride raconte l'histoire d'un homme de 80 ans, interprété par Jean Rochefort qui souhaite rejoindre sa fille en Floride. L'image de cet enfant lui permet de garder son passé en tête et de se pencher une toute dernière fois vers l'avenir, lui qui oublie si souvent les visages et les souvenirs. Pour l'épauler au quotidien, sa seconde fille, jouée par Sandrine Kiberlain, l'aide avec volonté et patience. Mais très vite, des fêlures apparaissent, sa maladie s'amplifie, et la situation va vite devenir inconfortable pour les deux partis...


Philippe Le Guay nous livre un film en deux parties, en reprenant l'arc narratif de David et Madame Hansen. La première verse dans la comédie pure et formelle, avec une suite de scènes entraînant des gags cocasses par la situation ou le dialogue. Les échanges sont ciselés de manière à enchaîner les punchlines de Jean Rochefort, laissant trop souvent le naturel de côté. Ainsi, comme dans le film précédemment cité, nous avons des différences d'âge, de mentalité et de vie qui permettent des confrontations tantôt désopilantes, tantôt tirées par les cheveux. La seconde partie utilise des ressorts plus tragiques, laissant la part belle à une dualité générationnelle et touchante entre le père et la fille sans jamais verser dans le pathos. Et c'est peut-être ce que l'on pourrait reprocher à ce film, qui, outre l'écriture des dialogues, n'invente ni ne réinvente pas grand chose. Au contraire, le résultat est commun, et le spectateur se retrouve sans empathie, voire apathique.


Floride est l'exemple même d'un film qui cherche à mélanger les genres sans réelle motivation première de base. Si le but était d'en faire une comédie, la dernière demi-heure est de trop, même si le lyrisme et la métaphore de son "dernier" voyage sont émouvants. Si le but était de nous raconter les derniers espoirs de cet homme par le biais d'une toute dernière aventure, comme en témoigne le titre, alors c'est raté car la première heure balaie toute substance scénaristique avec une panoplie de gags sans fond. Il fallait bousculer les codes et mêler les deux émotions ou ne jouer que sur une seule. Le résultat est pauvre. Pire encore, les situations comiques continuent même sur la fin, ce qui annihile toute considération pour la cause première du film : le lâcher prise du père et de la fille.


Jean Rochefort est éblouissant, on ne peut d'ailleurs s'empêcher de penser à un clin d’œil quant à sa propre vie et son regard dans le rétroviseur. Un grand homme, grand acteur, et une grande prestation, dont malheureusement le scénario n'est pas à la hauteur et entaché de plus de flashbacks inutiles et broyeurs d'intensité dramatique. Sandrine Kiberlain n'est pas étonnante mais donne une dimension intéressante à son personnage, notamment lorsqu'elle reste calme à des moments où elle aurait envie de claquer la porte et de pleurer. Sa justesse et sa délicatesse rendent le personnage très humain, on peut facilement s'y identifier. Une force admirable. En conclusion, Floride ne contient rien de plus que ce que l'on a déjà vu, que ce soit dans l'émotion procurée ou le discours. Seuls les dialogues (quoique trop artificiels par moment) et la prestation du duo principal sont à souligner. Un film trop désordonné et sans réel relief. Loin d'être une purge cela dit. Pour le reste...


Adieu mon rêve américain.

EvyNadler

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