Des corps, des seins, et des esprits sains

Drôle de promotion de la culture physique dans l'Allemagne du milieu des années 20, réalisée huit ans avant l’arrivée d’Hitler au pouvoir. S'il ne s'agit clairement pas d'un film nazi (le jugement serait quelque peu anachronique, en plus d'être incorrect), il n'en partage pas moins, du fait de la récupération par le nazisme de cette idée hygiéniste, la propagande de la culture du corps et de la fierté qui peut et doit en découler. C'est le "mens sana in corpore sano" poussé à l'extrême, en quelque sorte.


On retrouve d'ailleurs un certain attrait pour la beauté des corps de l'Antiquité, présentés tous également en bonne santé et gorgés de tonicité. Ce film appartient au cadre plus large de la "Körperkultur", célébrant la nécessité du corps sain, des activités en plein air (et si possible à poil... une des raisons probables pour lesquelles le film a été à de très nombreuses reprises censuré) : c'est donc un éloge unilatéral de la culture sportive, de ses bienfaits et de sa nécessité, démonstration à l'appui. Le face à face entre les deux vieux, "un de 50 ans qui n'a pas fait de sport" et "un de 60 qui a fait du sport" est à ce titre assez drôle. Il y a un esprit pédagogique au charme désuet, dans sa façon de prôner l'activité sportive dès le plus jeune âge, y compris avec les bébés, à travers des exercices de respiration ou encore en faisant attention à la posture.


Certains passages sont assez classiques, assimilable à de la biologie mâtinée d'éducation physique et sportive, d'autres plus fantasques avec reconstitution d'activités sous la Grèce antique : bains chauds ou froids, lutte gréco-romaine, chorégraphie de danses internationales... En ce sens, le film se distingue très clairement de l'idéologie nazie en montrant bien que le peuple allemand n'a pas le monopole de cette hygiène sportive et que le monde entier offre une grande diversité (y compris artistique) dans ces pratiques.


Un témoignage étonnant de cet état d'esprit, de cette passion impérieuse pour le sport, mais aussi pour la mixité de sa pratique : le corps de la femme est aussi souvent célébré que celui de l'homme, et de nombreuses cultures internationales sont abordées. La partie sur les (très nombreux) sports filmés au ralenti est intéressante mais un peu longue et ne produit plus, sans doute, le même effet aujourd'hui. À noter également un passage étonnant : l'ode à la nudité en famille. Au calme, sur la plage, entre deux exercices physiques au grand air.

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le 8 nov. 2017

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Morrinson

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