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Il y a des films qui ne racontent rien, du moins pas comme on l’attend. Free Fall fait partie de ceux-là. Pas de guerre, pas de sauvetage, pas de compte à rebours. Juste un homme, Maksim, suspendu quelque part entre la Terre et le néant. Et ce silence — plus vaste que tout le reste. Dès les premières images, on sent le froid. Un froid bleu, presque métallique, qui traverse l’écran comme une lame. Le souffle se condense dans le casque, la respiration devient un bruit, une mesure du temps. Le film ne cherche pas l’action, il cherche la présence : celle d’un corps livré à la pesanteur, d’un esprit qui s’effiloche dans l’infini. Oleg Urazaykin filme l’espace comme un souvenir. Rien n’est spectaculaire. Tout est suspendu. La station Delta semble flotter à la frontière du rêve, rongée par le silence et la lumière pâle des instruments. La caméra ne regarde pas le cosmos : elle écoute ce qu’il fait au visage d’un homme. Le vide devient personnage. Le son, une prière. Aleksandr Kuznetsov, dans le rôle de Maksim, ne joue pas : il habite. Son visage, presque immobile, dit tout — la peur, la fatigue, la résignation. On croirait voir un marin perdu sur une mer sans horizon. Et dans sa solitude, on entend nos propres vertiges, nos propres espaces intérieurs. Ce n’est pas un film sur l’espace. C’est un film sur le manque. Sur la manière dont un être humain tient encore debout quand tout repère s’effondre. Chaque plan est un battement lent, chaque silence un miroir tendu vers nous. La Russie a rarement filmé l’apesanteur avec autant de gravité humaine — ici, le cosmos devient une chambre d’écho pour les doutes, les regrets, les voix qu’on n’entend plus. La photographie, gris-bleu, éteinte, respire comme un souvenir noyé. Le montage, volontairement lent, laisse le spectateur flotter, comme Maksim, entre fascination et angoisse. Il y a du Tarkovski dans cette lenteur, du Solaris dans ces visages qui tremblent à peine, mais aussi une pudeur moderne, presque documentaire. Free Fall ne rivalise pas avec Gravity sur le terrain de la prouesse visuelle. Il la dépasse ailleurs — dans la simplicité, dans le tremblement, dans la vérité nue d’un être humain qui ne sait plus s’il veut rentrer. Ce film ne cherche pas à éblouir, il cherche à rester. Et longtemps après, on garde en soi la sensation étrange d’un souffle ralenti, d’un regard perdu derrière une visière embuée. Un film qui ne fait pas de bruit, mais qui vous laisse en apesanteur. Note : 12 / 20
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