Absence de musique (sauf grindcore) pour ambiance étouffante et plans serrés pour redouter l’invisible du hors-champ animent ce home invasion entre Eden Lake et A l’intérieur (moins le sang).
Un procédé du hareng rouge avec le couteau au début, de très légers mouvements de caméras, souvent fixes pour renforcer la tension, un 4e mur brisé pour nous culpabiliser comme dans Showgirls de Verhoeven, révolutionnent par leur sobriété les codes du thriller psychologique.
Le chien ne sert a rien, le téléphone ne sert a rien, le Père ne sert à rien, le fusil ne sert à rien, les voisins sont morts ou insouciants, le portail bourgeois enferme tout autant les protagonistes qu’ils les protègent, l’enfant meurt, les meurtriers n’ont pas de motifs psycho-sociaux, pas de final girl… tous les clichés sont pulvérisés pour donner une œuvre crue, cruelle, trop réelle.
Funny Games, porté par Lothar et Frisch, dans ses allures de Snuff, se veut antifictionnel, presque naturaliste.
Le premier meurtre est d’autant plus insupportable qu’il est suggéré, nous faisant tout à la fois souhaiter et redouter le cadrage suivant, plan-séquence qui durera 11 minutes.
Le départ des criminels est si brut et rapide que la peur demeure de les voire revenir.
Le rewind anti-deus ex sert à tuer le happy ending, à nous prendre au dépourvu, à nous faire une fausse joie, à nous dire « oui, tu applaudis un meurtre ». Pas de triche, pas d’échappatoire. Haneke joue encore avec notre irresponsable voyeurisme ; sarcasme encore plus malaisant.
La fin nous fait passer de l'autre côté du miroir, membre à part entière du duo meurtrier dont nous prévoyons, déjà apprivoisés, les prochaines (infr)actions.