Fury
6.7
Fury

Film de David Ayer (2014)

Plongée au coeur de la seconde guerre mondiale, à l'aube de l'armistice. Les alliés mènent une ultime offensive en Europe, nettement moins équipés que l'armée nazie, ils décident tout de même de risquer leurs vies pour éliminer le plus grand nombre d'ennemis. A bord du char baptisé Fury, le sergent Wardaddy (Brad Pitt) et ses hommes vont affronter une dangerosité sans limites en pleine campagne allemande, soit bien au delà des lignes ennemies. Voilà le topo.
Inspiré de faits réels, le scénario de David Ayer nous emmène dans les tréfonds d'une époque dont on n'oubliera jamais le sang, la douleur, les destructions massives et l'injustice. Les films traitant de cette deuxième guerre mondiale sont multiples, et souvent réussis. Peut être l'exercice est tel, qu'une déception cinématographique n'est pas permise. Cinquième long métrage du réalisateur, il ne déçoit pas, lui non plus, avec ce film aux couleurs glauques et à l'ambiance gelée, mais surtout au casting incroyable. Brad Pitt érigé en héros qui joue parfaitement son rôle de chef de bande aux expressions un peu beauf, mais toujours avec classe (parce que c'est Brad Pitt), accompagné de Shia Laboeuf, Logan Lerman, Jon Bernthal et Michael Pena. Sans oublier Jason Isaacs, Chris Eastwood et toute la compagnie... Bref un casting 100% masculin qui à de quoi ravir la gente féminine.
En plus des rôles de soldats bien détaillés, Ayer donne à chacun des personnages une dimension humaine qui rend l'identification possible et crédible. Sans pour autant en rendre un film larmoyant, il sait exposer les divers aspects de ce combat. A commencer par Shia LaBeouf qui se voit offrir le rôle le plus sentimental de l'histoire. Très croyant, pratiquant la prière quotidiennement et tentent de convaincre ses comparses de l'existence du paradis. Il sera d'ailleurs surnommé "la Bible" par ses collègues. Symbole de cette omniprésence de la religion en cette période de guerre, et malgré peu de dialogues, l'acteur nous offre des regards percutants face caméra qui subjugue et valent mille paroles. Accompagné de l'excellent Jon Bernthal, qui ATTENTION SPOILER


depuis sa mort dans The Walking Dead


mériterait des honneurs grâce à des rôles de fou dangereux qu'il interprète si justement que ça en devient inquiétant. Après Sicario, This is not a Love Story et prochainement dans la série Daredevil, il est dans Fury, toute la folie de cette boucherie cruelle et épuisante. Entre ses rires sataniques, son plaisir à blesser et son côté "j'aime faire le malin", l'acteur a trouvé ici l'occasion de dévoiler son talent brut. Il représente à lui seul toute la folie que peut engendrer un "boulot" comme celui-ci. Tuer, voir les autres mourir, tout le temps, partout. Le résultat est magnifiquement exposé par la puissance et la force de jeu de l'acteur qui n'en a pas fini de marquer les esprits. Michael Pena plus discret mais tout aussi important au niveau de la symbolique, représente lui l'amour et la difficulté d'être séparé des siens. C'est en tout cas ce que tente de montrer le réalisateur en multipliant les gros plans sur les photos de famille du soldat. Moins présente mais toute aussi intéressante, cette partie plus sensible de l'histoire montre le déchirement et le manque des siens dans la tâche ardue qu'était celle de combattre.
Le rôle principal revient cependant au jeune acteur Logan Lerman (révélé dans Percy Jackson puis Le Monde de Charlie à voir absolument), qui arrive sur le champ de bataille malgré lui. Forcé à se battre il devra affronter ses peurs et aura des difficultés à s'adapter dans ce nouvel environnement. Pour tenter de se faire une place il pourra compter sur les gifles quelques peu amicales de son chef, le Sergent Wardaddy. Ayant lui aussi droit à un éponyme, celui de "Machine", il finira par entendre raison et se rendre à la douloureuse évidence du "Je le tue ou il me tuera".
Se voyant attribuer l'une des scènes déterminantes, qui marquera une césure entre deux temps forts, "Machine" aura cette chance que peu ont eu : connaître un moment de chaleur amoureuse avec une femme. Cette aubaine sera à la fois l'objet de la convoitise mais aussi du dégoût et de la rigidité de ses camarades. Représentant de ces jeunes hommes obligés de se rendre sur le champ de bataille, Lerman livre une prestation puissante, qui malgré quelques détails un peu surréalistes, permettent aux spectateurs d'imaginer ce que c'était, d'être jeune en 1945.
Brad Pitt, de plus en plus éclatant dans ces rôles, apporte à cette histoire une dimension comique autant que dramatique. Il est toutes les problématiques de la guerre, ce qu'elle engendre, ce qu'elle vous apporte et surtout ce qu'elle vous enlève. Déjà tueur de SS au ton humoristique en tant qu'Aldo Rain (Inglorious Basterds, 2009), il livre à nouveau l'histoire d'un homme qui n'a "plus que la guerre", plus que son char pour se sentir en vie. Enlever la vie est, ce qui lui le fait tenir, il semble être le personnage le plus complexe de cette épopée sanguinaire racontée dans un décor froid et sombre. Un peu austère et rigide, il n'en demeure pas moins drôle et amical. Pilier, gardien de la fraternité au sein du char, Brad Pitt (il faut le dire) de plus en plus beau livre une prestation à triple tranchants : dans Fury, il est à la fois le bon, la bête et le truand. Sa polyvalence paye et rajoute du crédit à ce film de guerre d'un nouveau genre.


Agréable malgré quelques incohérences, Fury reste un plaisir cinématographique qui mêle Guerre et Amitié. Aux antipodes l'un de l'autre, ces deux termes signent pourtant la réussite d'un film brave et audacieux dont la richesse la plus évidente reste le choix des acteurs. Le casting ? Une particularité essentielle dans les œuvres de David Ayer qui sortira Suicid Squad dans les salles cet été. Jared Leto, Margot Robbie, Will Smith, rien que ça, seront à l'affiche de son sixième long métrage.


Mais avant, foncez voir Fury !

sarahbcp
7
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le 1 mai 2016

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Sarah Beaucamp

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