En fait, je m'attendais à un film social avec une romance en fond de toile et j'ai plutôt eu droit à une copieuse romance avec du rab social dans l'écuelle. Et le problème avec les romances omnipotentes c'est que ça me gave profondément si c'est pas réalisé avec génie, finesse d'écriture et intensité. Il faut dire que je n'ai jamais été un grand romantique...
J'ai eu la même impression qu'en regardant Compartiment n 6. C'est-à-dire le sentiment de voir une sorte de film d'auteur mainstream, un film qui n'a pas de réelle radicalité artistique, pas de signature et qui n'embrasse pas non plus le caractère divertissant du cinéma hollywoodien tout en lorgnant quand même dessus. Un film passe-partout en somme. Bref, le consensuel, le cinoche qui cherche à manger à tous les râteliers, c'est pas mon délire.


La structure éclatée/non-linéaire me pose également problème. C'es un casse-rythme et un cache-misère narratif qui n'a pas de véritable raison d'être (à part brouiller les facilités d'écriture et feindre la psychologie). Honnêtement, c'est une fausse bonne idée, un procédé de petit malin et j'aurais (probablement) attribué un 6/10 avec une narration plus classique. Outre cette scorie structurelle, Je pense que la principale erreur de Sebastian Meise est d'avoir voulu faire de son film une romance carcérale, ça enferme (pardonnez l'expression) et limite complètement les possibilités du récit tout en occultant la dénonciation de l’injustice sociale et la représentation de l'homophobie ambiante de l'époque. Ce qui fait que le film tourne vite en rond (d'où l'utilisation de la fameuse diversion de la construction non-linéaire). Je suis malheureusement trop initié pour me laisser avoir par ce type d'attrape-cinéphile du dimanche... J'ai également un souci avec le personnage de Hans qui semble être le mec parfait, le bon samaritain par excellence ; bienveillant, éperdument amoureux et prêt à tous les sacrifices pour autrui. Ça lui donne un côté unidimensionnel et lisse et puis la perfection c'est franchement chiant. Moi j'aime les gros connards antipathiques avec une humanité qui se révèle peu à peu au fil du récit. En clair, j'aime les personnages qui évoluent...
À tout cela, il faut rajouter un troisième et ultime faux pas : la relation entre Hans et Oskar. Apparemment, Oskar est LE GRAND AMOUR d'Hans Hoffmann mais le personnage d'Oskar est quasi absent de la trame ; mis à part un laconique flashback et quelques échanges oraux il n'y a aucun background. Dès lors, difficile de comprendre le tourment intérieur d'Hans et d'entrer en empathie avec lui.


Grosso modo, un film trop romantique pour être honnête, un mélodrame contrarié et éparpillé sans grandeur ni ampleur bénéficiant néanmoins de solides interprètes. Une oeuvre ambitieuse certes, mais Sebastian Meise n'a clairement pas les moyens de ses ambitions. Je suis curieux de voir ce que quelqu'un de talentueux comme Todd Haynes pourrait faire de cette histoire...
In fine, pour une mémorable romance où figure Franz Rogowski, le cinéma de Christian Petzold est infiniment plus recommandable.


PS : Je suis pas historien mais il y avait vraiment des caméras couleurs derrière des vitres en tain dans les toilettes publiques de la RFA ?

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le 16 févr. 2022

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Tex_AS

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