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Le mythe du loup-garou constitue l'un des principaux archétypes du monstre classique du cinéma, aux côtés de celui du vampire et de la créature de Frankenstein. Le genre du film de loup-garou, quant à lui, est cependant très mal représenté depuis maintenant plusieurs décennies, outre l’apparition de nombreuses productions aux intentions douteuses telles que Twilight ou Underworld, où la créature se voyait réduite à un simple rôle de faire-valoir humiliant, la qualité discutable de la plupart des œuvres récentes consacrées au lycanthrope, tel que le tristement célèbre Wolfman, aura fini par avoir raison de la réputation de ce sous-genre horrifique pourtant très riche historiquement parlant, dans cette optique, on ne peut que se réjouir de découvrir de temps en temps une petite perle comme Howl, qui ne paie pas de mine, mais qui en a dans le ventre. Le jeune réalisateur Paul Hyett a clairement trouvé la voie pour mener sa barque dans la bonne direction, avec à la clé un bon petit film indé qui n'est certes pas exempt de défauts, mais a au moins le mérite de redonner des couleurs à un genre pour le moins négligé, voir même maltraité ces dernières années.


Hyett et son scénariste Mark Huckerby ont abattu un travail remarquable pour faire de Howl une œuvre respectant son matériau de base. Son aspect brut et désabusé se révèle bien trop rare dans ce genre de productions, d'autant plus que ce film n'hésite pas à placer quelques touches d'humour étonnantes, induites en grande partie par un casting de qualité, incarnant un mélange de personnages très varié et attachant.


Avant de développer, arrêtons-nous un instant du côté du synopsis:


L'intrigue de Howl, débutant sur les quais d'une gare en Angleterre, se concentre sur Joe (Ed Speleers), un jeune chef de train ayant une poignée de passagers sous sa responsabilité durant un trajet nocturne sous la pleine lune. Ces passagers représentent tous une classe bien distincte de la Grande-Bretagne de David Cameron: La femme carriériste chevronnée (Shauna MacDonald), l'homme d'affaires véreux (Elliot Cowan), le parasite social, le nerd, le vieux couple anxieux et la jeune fille à l'attitude déplacée, auxquels vient encore s'ajouter Ellen (Holly Weston), responsable de la restauration, incarnant ici l'élément romantique du film, et la seule source de refuge pour Joe, face au traitement pour le moins odieux que lui réserveront les autres personnes présentes à bord. Les choses empireront encore lorsqu'un arrêt forcé du train causé par un cerf pris dans les roues d'une des voitures plongera l'ensemble des protagonistes dans un véritable cauchemar: Coincé au milieu d'une épaisse forêt, le convoi est soudainement attaqué par un animal au départ identifié comme un ours. Ce n'est qu'en entendant ses hurlements que les passagers commenceront à comprendre la véritable nature de la menace qui pèse sur leur vies...


Howl, à ne pas confondre avec le biopic d'Allen Ginsburg avec James Franco, est le deuxième film réalisé par Paul Hyett, après The Seasoning House en 2012. Bénéficiant notamment d'un très bon usage de l'espace de jeu, en transformant un simple train en un véritable cercueil sur roues, ce film est un parfait exemple de huis-clos parvenant à générer la tension sans recourir à des dispositifs trop artificiels. Hyett semble maîtriser l'orchestration de ce genre bien particulier d'histoire, au travers notamment d'une écriture efficace, prenant le temps d'instaurer ses personnages et son élément perturbateur.


Il est à noter que ce jeune cinéaste est un ancien spécialiste des effets spéciaux, dont les travaux les plus notables concernent les films The Descent et Doomsday, tous deux de Neil Marshall. Inutile de préciser que l'approche de ce film fut donc certainement influencée par ses précédentes expériences, son intrigue est ici développée de façon étonnamment intelligente, en prenant notamment le parti de la simplicité extrême. Un cadre oppressant, un groupe d'humains un peu paumés, une grosse bestiole bien poilue, voilà les quelques points qui permettront de résumer ce film, ni plus, ni moins. Bien évidemment, cela occasionne quelques défauts rédhibitoires, comme le fait que les personnages soient pour la plupart très lisses et sous-développés. Cependant, il n'y a rien de mal à observer un énorme monstre détruire des coquilles vides de temps en temps, si le tout est bien conçu et mis en scène.


En effet, il n'y a rien ici que les amateurs du genre n'aient déjà vu auparavant, mais d'une façon ou d'une autre, cela n'empêche jamais le film d'être amusant et agréable. Quelques fois encore, Hyett essaye de développer certains caractères plus que d'autres, mais cela finit toujours par ressembler à une tentative forcée de donner une profondeur inutilement artificielle à l'ensemble. Dans le monde de Howl, c'est la conception du loup-garou et les séquences d'attaque qui feront le gros de l'expérience du visionnage. Le design du monstre n'a rien de tape-à-l’œil d'une manière général, et ressemblerait presque au fruit d'un amour interdit entre Victor Crowley et un vieux chien errant. Bien sûr, cela ne ressemble pas vraiment à l'image que l'on se fait généralement d'un loup-garou, mais ajoutez à cela le fantastique travail de l'équipe de maquillages prosthétiques, notamment au niveau des yeux de la créature, incandescents et hypnotiques, ainsi que des effets spéciaux de tout premier ordre lors des scènes de transformation et ce qui aurait pu n'être qu'un énième film ennuyeux ou médiocre se transforme soudain en un objet effrayant et visuellement frappant.


Comme la plupart des films réalisés par des anciens techniciens, Howl tire donc une grande force de ses effets visuels. Les loups-garous de Hyett possèdent une morphologie de bipède tout comme les lycanthropes de Dog Soldiers, mais affichent une apparence bien plus macabre, élégante et musclée. La réalisation leur offrant par ailleurs une mise en situation intelligente, à travers un montage rapide, donnant l'impression de monstres à la puissance démesurée, se déplaçant à une vitesse effrayante. Les créatures ne représentent cependant qu'une petite partie de l'ensemble de la composition visuelle du film. Les plans sombres et claustrophobiques de l'intérieur du train sont absolument parfaits pour générer la tension et l'angoisse. Mais cela ne s'arrête pas là, puisque les bois entourant nos protagonistes représentent également une forte source d'effroi et d'isolation.


Le scénario n'hésite pas à garder son lycanthrope dans l'ombre aussi longtemps que possible tout au long de son premier acte, induisant la peur et l'inquiétude de manière progressive avant que la boucherie ne commence. La seconde moitié du film, quand à elle, se révèle aussi ambitieuse que ne le laisse présager son introduction, bien que dans les faits, son contenu scénaristique ne fasse que suivre un arc assez prévisible, Hyett surprend toutefois par un choix très intrigant d'évacuer certains tropes scénaristiques classiques des films de loup-garou pour y insérer des éléments inspirés d'autres sous-genres, celui du zombie en tête. En effet, "l'infection" se transmet ici par morsure, ce qui occasionne de nombreux conflits internes au groupe, quand à la décision d'aider ou de tuer les personnes mordues, si vous êtes familiers de nos amis à la chair en décomposition, vous savez déjà comment cela se termine. Par ailleurs, certaines de ces scènes de conflit auraient pu constituer un hommage amusant à la fameuse séquence "testing" de The Thing, mais l’écriture reste suffisamment intelligente pour éviter de tomber dans la référence facile qui aurait pu tourner à la parodie.


Howl est clairement un film "de siège", mais il s'agit surtout d'une œuvre présentant de nombreux personnages issus de divers horizons et forcés de travailler ensemble, ou du moins, de se chamailler sur la façon de gérer la crise dans laquelle ils sont embarqués. Dans cette optique, les performances d'acteurs ont bien entendu leur importance. Ed Speleers incarne ici l'archétype du héros un peu maladroit mais attachant, avec lequel on sympathise immédiatement, son écriture lui permettant notamment de s'élever au-dessus du reste du casting, et de prendre les rênes de l'action lorsque cela s'avère nécessaire. Elliot Cowan tient quand à lui un rôle de banquier coureur de jupons à la mentalité répugnante faisant figure d'élément perturbateur secondaire. Shauna Macdonald, dans sa composition de femme d'affaires agressive, se révèle être bien plus qu'un simple faire-valoir au physique aguicheur, se démarquant surtout de par son langage grossier et sans concession. Calvin Dean, de son côté, hérite d'un rôle comique, en prenant les traits d'un insupportable de fan de football à l'anglaise. Sean Pertwee, visage bien connu des amateurs de films d'horreur à petit budget, apporte sa chaleur et sa légèreté naturelle à son personnage, à tel point que l'on souhaite réellement en savoir plus sur lui et sur son sort, enfin, on notera également la présence très plaisante du trop rare Duncan Preston, dont la prestation ne manquera pas de ravir tous les amateurs de séries anglaises classiques.


Cependant, tout n'est pas parfait à ce niveau. Si certains personnages traversent le film de fort belle manière, d'autres auront tendance à s'effacer petit à petit, desservis par un développement inégal et surtout inférieur à leurs collègues. La plupart de ces caractères incarnent finalement une forme de cliché récurrent dans l'univers du film d'horreur, leur interprétation est loin d'être sans intérêt mais leur écriture, quant à elle, se révèle éculée au possible, malgré un dialogue assez naturel et bien rythmé. Le cas du personnage d'Ellen, incarnée par Holly Weston, en est un parfait exemple, souffrant notamment de la comparaison avec la brillante performance de Shauna Macdonald.


En outre, il s'agit d'un film un peu trop générique dans certains de ses aspects pour avoir la chance de se rendre véritablement mémorable, sa structure même occasionne quelques problèmes assez rédhibitoires, le principal d'entre-eux se situant dans son script, empruntant un chemin pour le moins évident plutôt que d'essayer quelque chose de risqué ou d'inhabituel. Certaines facilités scénaristiques se font également ressentir, aucune explication ne sera ainsi donnée sur la présence pour le moins étrange de loups-garous dans la campagne britannique, exception faite d'une furtive conversation assez peu convaincante semblant avoir été placée là pour la forme plus qu'autre chose.


Par ailleurs, en essayant de faire appel à un éventail plus large de clichés inhérents aux films de loup-garous, la réalisation de Hyett se perd quelque peu dans un exercice de style un poil trop prévisible. Ce qui n'est pas forcément une mauvaise chose en soi, encore une fois, la décision de rendre l'intrigue du film très simple est un parti-pris louable. Pourtant, on ne peut s'empêcher de ressortir frustré du visionnage, avec un fort sentiment de manque, on aimerait en voir plus, et ce long-métrage échoue quelque peu à contenter notre appétit.


Un autre petit point noir à signaler concerne l'utilisation de CGI dans l'animation des visages des loups-garous, alors que la créature en elle-même et les effets gores sont généralement excellents, la modélisation des visages des lycanthropes se révèle très inorganique par rapport au reste de leur conception. On peut supposer sans trop se mouiller que le budget très faible de cette production ne permettait pas l'utilisation d'animatronics de qualité, dommage car ce genre de petits défauts a toujours la fâcheuse tendance de faire sortir le spectateur du film.


Ces quelques écarts se révèlent légèrement pénalisants, car on ressent une véritable compétence de mise en scène, souvent cachée quelque part dans l'arrière-plan, comme entravée par la paresse de l'écriture. Ce qui n'empêche pas un traitement de l'action de très bonne tenue, malgré un sentiment toujours présent de déjà-vu, certaines séquences ont de quoi réserver de véritables frayeurs aux âmes les plus sensibles et un immense plaisir aux amateurs de sensations fortes.


Pour conclure, Howl est-il l'un des meilleurs films de loup-garous de ces dernières années? À bien des égards, oui. Notamment par le biais de son casting hétéroclite, de ses effets spéciaux de qualité, de son design unique et de sa narration limpide et efficace. Cependant, Paul Hyett a clairement joué ici la carte de la sécurité, ce qui l'aura par conséquent empêché d'accoucher d'un film véritablement mémorable, et encore moins novateur ou révolutionnaire, mais il est bon de souligner qu'avec le retour d’œuvres telles que celle-ci, le genre peut au moins se targuer de retrouver des couleurs.


En somme, un bon petit film de loup-garou se profilant comme un excellent moment à passer pour tous les amateurs de lycanthropie, et de cinéma horrifique en général, la créature peut enfin recommencer à rugir comme il se doit, pour notre plus grand bonheur!

Schwitz
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le 16 juil. 2017

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