La plastique c'est fantastique
Il est un peu malaisant de voir un grand cinéaste s’aventurer avec nostalgie sur un terrain qui fut le sien. Déclarer son amour au cinéma n’a rien d’infamant, mais lorsque qu’on dérive vers la copie laborieuse à coup de citations littérales et de reproductions des grandes scènes de la nouvelle vague, de best of de cinéma sans réelle substance, le néant guette.
Il est étonnant de voir à quel point ce film manque d’épaisseur et d’incarnation, quand il cherche à nous rendre témoin de scènes crues, sexuelles et transgressives. Ces personnages de bourgeois à qui l’on reproche finalement de faire la révolution dans leur appart, aux frais de papa et maman qui leur laissent quartier libre, pourraient symboliser le propos général de ce film qui cherche à faire comme si, jouer à faire du cinéma sans réellement en être. La faute aux comédiens, probablement, peu convaincants lorsqu’on leur demande davantage qu’exhiber leurs corps, splendides au demeurant ; Eva Green, particulièrement, n’a pas grand-chose de plus à proposer que sa parfaite plastique
On ne peut cependant nier le talent de Bertolucci, qui filme de nombreuses scènes avec un grand sens de la composition, qui n’est pas sans évoquer les plus beaux moments du Dernier Tango à Paris. La salle de bain et ses miroirs à trois pans donne des merveilles, et certains plans, d’une grande beauté dans l’enchevêtrement des corps, renvoient aux tableaux de Delacroix, moins La Liberté guidant le peuple, au mur d’une des chambres, que sa tradition orientaliste ou La mort de Sardanapale.
La déception n’en est que plus grande que de voir cette force du regard se diluer dans une intrigue inepte et d’une intensité sensuelle tombant étrangement à plat.