Son remake avec Al Pacino était très moyen, mais ce Insomnia norvégien de Erik Skjoldbjaerg fait honneur aux oeuvres originales. Avec une réalisation maitrisée et parfois saisissante, il parvient à insuffler dans son film une image et une ambiance aussi personnelle qu'onirique. Les nuées de brouillard qui se déplacent telles une entité propre, rais de lumière superbes, visages capturés avec élégance, intrigue recherchée, les éléments positifs se succèdent et nous laissent planer, contemplatifs, amusés, intrigués devant cet original plus réaliste, plus immersif que le remake très discutable de Christopher Nolan.

Les personnages évoluent dans cet univers avec un naturel très convaincant, comme ces bons vieux films qui possèdent cette spécificité particulière qui lui confère un souffle réaliste et convaincant, nous embarquant avec plaisir les suivre dans leurs pérégrinations aux airs solennels que j'affectionne tant. Le fond de l'affaire est similaire au remake éponyme, mais il en subsiste quelques nuances bienvenues. Ainsi, le personnage central, Erik Vik (Sverre Ankel Ousdan), n'est plus véritablement le coeur de l'oeuvre, mais un flic qui a fait une énorme boulette en tirant sur son partenaire, ce qui va l'engluer dans un monde sans sommeil, sans repos, dans lequel l'espoir de rédemption n'est plus qu'une lueur fragile.

Contrairement à Nolan, Skjoldbjaerg ne se repose pas uniquement sur sa "star" pour appâter le spectateur peu exigeant, mais tente d'établir une profondeur plus suggestive à son oeuvre, un sens plus abstrait mais sans conteste plus crédible. Bjorn Floberg, lequel campe le tueur Jon Holt, interprété dans le remake par Robin Williams, est tellement plus convaincant que ce dernier ! Un vrai charisme, une présence certaine, et ce regard luisant d'intelligence qui colle parfaitement au personnage. Cet Insomnia n'est ni un blockbuster ni un chef d'oeuvre, mais il possède cette identité propre aux films de qualité, par son ambiance, ses acteurs, et surtout pour la qualité de sa réalisation.

La toute première scène du film, accompagnée de cette musique immersive, est d'une qualité rare. La future victime rit, sourit avec un charme ravageur, une innocence contagieuse et mélodramatique. Son regard ingénu nous plonge immédiatement dans l'ambiance, pour une scène annonciatrice de cet aspect contemplatif maitrisé des plus appréciables. Erratique et convaincante, cette ballade initiatique norvégienne sur fond d'enquête sordide est un pur bonheur, léger, beau et solennel.

Vous n'avez pas été convaincus par le Insomnia de Nolan ? Regardez celui-ci, vous serez guéris.
Taurusel
8
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le 6 mars 2013

Modifiée

le 7 mars 2013

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Taurusel

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