Irréversible… Olala que ça va être long et compliqué de faire la critique de ce film. Je sens déjà que je vais me faire lapider. Je vais essayer d'être le plus objectif possible, pour ne froisser aucune sensibilité (bhein ouais, c'est dans l'air du temps, vous le savez bien).


J’ai vu ce film quand j’étais un jeune ado et il m’avait bien évidemment terriblement impressionné. Sur la base de mes souvenirs, j’avais attribué cinq étoiles à ce film, cinq étoiles pour son impact, et sa dimension expérimentale atypique. Mais aujourd’hui que je le revois, avec, je l’espère, une meilleure culture cinématographique (et un goût aiguisé), je ne peux m’empêcher de penser que cette œuvre est une arnaque, du néant emballé dans un joli paquet obscène, bien provocant, pour attiser la curiosité des jeunes gens en quête de sensations fortes et d’hyperviolence. Et ça a marché, sur moi en tout cas, et il m’est même arrivé de prétendre que ce film était extraordinaire. Pénible, mais extraordinaire. Aujourd’hui, je révise mon jugement. Je crois que ce film est extrêmement mauvais (j'aurais employé d'autres mots si je ne m'étais pas promis de ne froisser personne).


Alors, bien évidemment, il y a l’aspect antéchronologique (le fait que le film commence par la fin et se termine par le début) qui ne saurait nous laisser indifférents. Au départ, c’est un élément que je trouvais hyper captivant, et plutôt bien foutu. Le problème, c’est que depuis que je me suis lancé dans mon marathon des chefs d’œuvres du cinéma, je devine (et je trahis parfois) les inspirations (ou les copié-collés) des productions les unes sur les autres. Par exemple, dans ce cas précis, le film Memento, de Christopher Nolan, sortie en 2000, utilise la chronologie inversée, mais dans un contexte en totale adéquation avec l’intrigue du film (basé sur un personnage amnésique), et de manière sublime. Gaspar Noé emploie le même schéma deux ans plus tard (hasard ?) pour Irréversible, mais d’une façon particulièrement grossière, techniquement parlant. Le film souffre énormément de cette comparaison. Du coup, le seul élément qui m’intéressait véritablement ici a été occulté par une meilleure référence. Voilà comment le film a perdu tout intérêt à mes yeux.


Il y a ensuite, l’hyperviolence. Alors, lorsque j’étais ado, j’avais sans doute une sorte de curiosité avide qui m’a poussé à regarder en intégralité les deux scènes d’horreurs abjectes et interminables de l’œuvre. Aujourd’hui, j’ai grandi, et je n’ai pas honte de dire que j’ai détourné les yeux. Cette violence, c’est trop pour moi. Je ne la comprends pas. Et dans un sens plus large, je ne comprends pas la raison d’être de ce film. « Le temps détruit tout »… Bon OK, c’est bien beau cette conclusion. Mais j’ai envie de dire, est-ce que cela méritait vraiment de telles obscénités ? Parce que les scènes de violences ne sont pas seulement violentes, elles sont obscènes par leurs explicités et leurs durées.


Par ailleurs, je trouve que le film est aussi mauvais sur le fond. Il semble n'y avoir pas ou peu de scripts. Cela donne de longs plans-séquences où les acteurs doivent improviser des dialogues le temps d’un voyage en métro, par exemple, mais ils sont si mauvais (ou l’exercice est tellement difficile) qu’ils tournent en boucle le même sujet. Les personnages se coupent la parole. Belucci n'arrive pas à en placer une. C'est inaudible, on ne comprend rien. C’est d’un ennui absurde. L’impro est si mauvaise que Vincent Cassel donne même son véritable nom plutôt que celui de son personnage lors d’une conversation. Ce film c'est du malaise en barre.

Les mouvements de la caméra me donnent envie de vomir, littéralement (à moins que ce soit l’ambiance musicale infernale). Le tournage en Super 16 est médiocre. L’image est floue. Le résultat frôle l’amateurisme. Le rythme est indigeste. Le film ne fait qu’une heure trente, mais paraît en faire trois.


La représentation de la communauté homosexuelle…


Franchement, je ne sais même pas si j’ai le courage de pointer du doigt cet aspect du film…


Je vais juste dire que je suis consterné par l’homophobie poisseuse véhiculée par la première partie du film. Pour supporter cela, je me dis que Noé a voulu représenter tout ce qu’il y a de plus sordide dans ce milieu, c’est vrai que ces choses-là existent (les backrooms, les fistinières, etc.), mais un tel concentré de violence et de déchéance me paraît tout à fait extraordinaire. En tout cas, j’avais l’impression de ravaler mon vomi tellement le spectacle m'apparaissait répugnant.


Je n’apprécie pas Vincent Cassel ni en tant qu’acteur ni en tant qu’individu (en tout cas de ce que j'en vois en interview). Je reconnais qu’il a beaucoup de charisme, une vraie gueule, et beaucoup de charme en prime, mais je le trouve tout simplement mauvais. Je n’aime pas son jeu, je ne le trouve jamais crédible. Même constat pour Monica Bellucci. Évidemment, elle est a réussi l’exploit de se dépasser pour tourner ses scènes de nus incroyables et cette scène de viol épouvantable, mais cela ne veux pas dire qu’elle est une bonne actrice pour autant. Si les scènes citées sont, dans l’action, incroyablement réaliste, dès qu’elle ouvre la bouche pour parler tout devient ridicule. Elle a une scène notamment ou une femme enceinte lui donne la réplique dans laquelle brille son amateurisme. J’apprécie Albert Dupontel, mais pas dans ce film, où je le trouve, lui aussi, très médiocre. Au final, il convient de se rendre à l’évidence: si les trois immenses acteurs qu'ils sont se vautrent de manière aussi lamentable dans leurs performances sur un seul et même film c’est peut-être par ce qu’ils étaient très mal dirigé. Toute la faute incombe sans doute au réalisateur, et a la vision créative qui a engendré ce spectacle désolant.


Heureusement, le film peut compter sur une scène sublime. Celle des jeux passionnés entre Alex et Marcus, nus, qui est d’une intensité poétique et visuelle folle. Mais je ne m'emballe pas, parce que tout le reste m’a dégoûté.


Je me suis forcé à revoir ce film pour ne pas rédiger ma critique sur la base de mes souvenirs et je me suis rendu compte qu’il était parfaitement surcoté. C’est un film expérimental qui se masturbe, et qui se révèle, à y regarder de plus près, d’une banalité désobligeante. Sous ses faux airs provocateurs, le film n'a tout simplement rien à offrir.


Ma critique est finie, mais j’ajoute un petit paragraphe à l’attention de tous celles et ceux qui souhaiteraient m’apprendre le bon goût, ainsi que m'expliquer ce que je n’ai pas compris dans ce film (oui, oui, j’ai l’habitude maintenant, surtout lorsque j’émets des avis tranchés sur des films aussi controversés que celui-ci). S’il vous plaît, ne vous manifestez pas si vous souhaitez m’arracher les yeux parce que vous avez aimé le film et que moi je suis un inculte, ignare, qui ne comprend rien au cinéma. Je respecte votre avis, et je comprends que vous aimez ce film, mais moi, il ne me plaît pas et SensCritique me donne les moyens de partager l'expérience que j'ai vécue. Si mon avis négatif ne vous plaît pas, ce n'est pas un problème, car je ne vous critique pas vous. Donc, inutile de me laisser des messages méchants, je ne répondrais qu’à ceux qui communiquent dans le respect.


Casse-Bonbon

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