Il y a des films où on a un peu de mal à entrer.
Mais dont l'effort en vaut la peine.
Jules et Jim, on se dit au début, c'est assez curieux. On dirait quand même bien un roman des années 1950 : sans doute que Truffaut a réussi à capter l'atmosphère du livre (c'est une supposition, je ne l'ai pas lu). On a l'impression qu'à l'insouciance des personnages répond l'insouciance de la mise en scène.
Ce qui est faux.
Parce que la mise en scène est, au contraire, très précise, elle donne en un minimum de temps le maximum d'informations sur les personnages.
Alors c'est brillant : quand un film si élaboré donne une telle impression de naturel.
Et puis la guerre arrive. Le récit bascule. La guerre ne compte pas tellement, en fait. Elle est l'élément déclencheur du récit. Il fallait quelque chose de grave pour balayer l'insouciance de nos protagonistes et rebattre les cartes.
C'est à partir de là que le triangle amoureux, qu'on envisageait sans le moindre doute, se met réellement en place. A ce moment là, Jules est marié à Catherine. mais celle-ci, c'est la liberté personnifiée. L'existence réglée de savant que vit Jules n'est pas de son goût. Bien sûr, arrive Jim. On voit de quoi sera fait le récit.
Encore que.
Contrairement à ce que l'on aurait pu imaginer, cette histoire n'aura rien de banal. Ou peut-être que si, finalement. C'est l'histoire de deux hommes amoureux de la même femme. Celui qui l'aime le plus s'efface, laisse sa place.
On l'a lue ou vue mille fois, cette histoire.
C'est le traitement, alors. La vitalité du film épouse celle des personnages. De Jim et de Catherine de fait. Ce sont eux les moteurs de l'histoire. Jules, avec son costume d'esclave, était condamné à être à la traîne.
La voix off fonctionne très bien. Parce que les images gardent en elles un quelque chose de littéraire. On a déjà dit à quel point le début faisait penser à un style de littérature. La voix off renforce. Elle donne au récit sa cohésion, en permettant de garder la liberté d'en montrer si peu. Elle raconte, pendant que le film montre. Très littéraire : est-ce que les phrases sont directement issues du roman?
Une chose est certaine : Truffaut savait faire une adaptation.