Avec un sujet pareil, on se doute que L'étoffe des héros va jouer la carte du patriotisme. Sauf que, oui et non. Car le patriotisme du film est parasité d'emblée. Par le contrepoint formé par les femmes des pilotes, en premier lieu. Leurs peurs et la manière dont elles vivent les exploits de leurs maris font apparaître les vantardises de ces derniers comme des caprices d'enfants gâtés. Par les hommes politiques, dont un vice-président pas loin d'un Donald Trump en terme de représentation, en second lieu. Sans parler des scientifiques qui prennent les pilotes pour des cobayes, eux ou des singes, c'est du pareil au même. Et de la presse, très agressive, dont un plan saisissant les montre cassant barrières et vitres pour accéder aux femmes qu'ils veulent à tout prix interviewer, comme s'ils étaient une horde de zombies.
Avec tout ça, L'étoffe des héros s'avère parfois très drôle. Corrosif, même. Là où il n'a plus aucun recul, c'est sur les pionniers. Ce film est une ode à la gloire des pionniers. Nous verrons d'ailleurs l'un d'eux à cheval dans les étendues désertiques, marquant la parenté d'avec la conquête de l'ouest. Ils sont les héros sans peur et sans reproche. Sauf leur attitude égoïste envers leurs femmes. On l'a dit. Il y avait de quoi mettre à mal le virilisme, c'est en germe. Mais ce n'est pas assez creusé, et complètement évacué dans la dernière partie. La dernière heure est hagiographique. Et puis, un plan qui se déroule sans accrocs... Si cette dernière heure avait été différente, le film aurait été grandiose. Dommage.
Reste que, pendant deux heures, par son originalité et son discours plus ambivalent qu'il n'y paraît, L'étoffe des héros passionne. Ce qui n'est pas rien.